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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — II. LES SÉMITES

forêts épaisses où il n’y a aucune route tracée ; il s’égare à droite, à gauche, en avant, en arrière, sans pouvoir trouver d’issue. Géber se flatte d’avoir trouvé la route. Il commence par déterminer la position des apsides par la considération des mouvements ; alors il est en état de déterminer les distances réciproques des trois centres, et de prouver la bissection de l’excentricité que Ptolémée a supposée sans pouvoir la démontrer. Il est vrai que Ptolémée ne la prouve point a priori, mais il la déduit du calcul, et en montrant que cette position satisfait aux observations…

» Dans le livre IX, il ne change rien à la théorie de Ptolémée pour les latitudes, non plus qu’à sa théorie des disparitions et réapparitions des planètes ; en sorte que tout considéré, ce qu’on doit à Géber se réduit au théorème des triangles rectangles ; c’est quelque chose encore…

» Nous avons dit, d’après Weidler, que Géber cite Arzachel[1] ; le fait est qu’il ne cite que des noms grecs qu’il a trouvés dans Ptolémée, et qu’il paraît étranger à tout ce qui s’est fait en Astronomie depuis l’École d’Alexandrie, si ce n’est pourtant à la substitution des sinus aux cordes opérée par Albatégni qu’il ne nomme pas ; et comme il ne s’attribue pas cette idée, il faut qu’elle soit plus ancienne que lui. Il a donc vécu après Albatégni ; mais en quel temps précisément ? C’est ce qu’il n’est pas possible de décider. »

Évidemment, Delambre est déconcerté par l’allure étrange de l’Astronomie de Géber. Ce Zoïle de Ptolémée cherche avec une minutieuse et chicanière exactitude les défauts, même les plus minimes, du système établi par l’Astronome de Péluse ; et des objections, souvent graves, que les Arabes ont élevées contre diverses parties de ce système, des modifications que leurs observations les ont contraints d’y apporter, notre auteur ne semble aucunement soucieux ; il ne paraît pas même en avoir connaissance. Tous les astronomes de l’Islam sont frappés de l’insuffisance de la théorie de la précession donnée par Ptolémée ; à leurs critiques, Géber ne fait pas la moindre allusion. Il y a vraiment là un mystère dont Delambre a été étonné, mais qu’il n’a pas cherché à éclaircir. Efforçons-nous de l’expliquer.

« Les figures, dit Delambre à propos de la description de l’instrument imaginé par Géber, sont assez équivoques, et les lettres

  1. Dans son étude des étoiles fixes, Géber cite souvent (Op. laud., lib. VI, pp. 85-88) une étoile qui se nomme Azimek Alahazel ; n’est-ce pas ce nom Alahazel qu’en une lecture trop rapide, Weidler aurait pris pour celui de l’astronome Arzachel (Al Zarkali) ?