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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

trajectoires circulaires de la tête du Bélier et de la tête de la Balance un diamètre de 8° 37′ 26″. En indiquant avec cette minutieuse précision les valeurs numériques des trois éléments du mouvement de trépidation, l’auteur nous laisse supposer qu’il les déduit d’observations nombreuses et soignées. Or, à ces observations, à la discussion dont elles ont dû être l’objet, il ne fait pas la moindre allusion. Il nous présente une théorie arrêtée dans ses moindres détails, et ne nous laisse rien deviner des tâtonnements par lesquels il est parvenu à la construire. C’est un des caractères mystérieux qu’offre le Liber de motu octavæ sphœræ ; ce n’est pas le seul.


IX
AL ZARKALI ET LES Tables de Tolède

Une autre étrangeté du Liber de motu octavæ sphœræ nous conduit à nous poser cette question : Cet écrit, est-il de Thâbit ben Kourrah ?

Il peut paraître singulier que nous hésitions à attribuer cet opuscule à l’Astronome sabian, alors que tous les manuscrits de la traduction latine le donnent comme de lui. Mais ce témoignage unique, car tous ces manuscrits sont vraisemblablement des copies d’un même original, vaut-il contre le silence et, surtout, contre le témoignage formel de plusieurs auteurs arabes ?

Dans ceux de ses écrits astronomiques qui ont été mis en latin, Thâbit ne fait aucune allusion à son livre du mouvement de la huitième sphère ni, d’une manière plus générale, au mouvement de trépidation.

Sans doute, la lettre adressée à Ishac ben Honein, qu’Ibn Iounis nous a conservée, témoigne que Thâbit ben Kourrah s’était occupé du problème du mouvement des étoiles fixes et qu’il avait tenté une solution de ce problème. Mais en quoi consistait cette solution ? Nous n’en savons rien, si ce n’est qu’elle n’était pas identique à celle des anciens astrologues mentionnés par Théon d’Alexandrie.

Si l’on voulait donc prouver que le Liber de motu octavæ sphæræ est bien de Thâbit ben Kourrah, on ne saurait, en tous cas, invoquer le propre témoignage de Thâbit.

Il ne semble pas qu’on puisse davantage appeler comme témoin aucun autre astronome de l’Islam.