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LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES

chel était préposé aux instruments et dirigeait les observations. Lorsque ledit roi[1] eut été chassé de Tolède par les Chrétiens, Arzachel alla à Cordoue ; là, il imagina et exécuta de nouvelles observations ; là aussi, il composa un traité sur le mouvement du Soleil et des étoiles fixes. Après lui, vint Alcamet, qui fut disciple d’Arzachel et, aussi, disciple de Messala (Masciallah)[2] ; cet Alcamet composa les tables persanes et les quatre premières tables. Après lui, Albubalet de Cordoue, qui fit ses observations à Murcie, acheva ces tables et y ajouta les tables des conjonctions solaires. »

Quelle que soit l’histoire exacte de la composition des Tables de Tolède, il semble, en tous cas, que ces tables nous présentent un reflet fidèle des doctrines astronomiques professées par Al Zarkali.

AI Zarkali a-t-il emprunté à Thâbit ben Kourrah le système de trépidation qu’il adopte ? Nous allons entendre des auteurs musulmans, qui ont écrit moins d’un siècle après Al Zarkali, nous affirmer de la manière la plus formelle qu’il a imaginé le premier ce système. Si nous voulons admettre leur témoignage, et aucun témoignage en sens contraire ne nous autorise à le récuser, il nous faudra bien admettre également que le Liber de motu octavæ sphæræ n’est point de Thâbit, qu’il est d’Al Zarkali ou de quelqu’un de ses disciples.

Voici le premier et le plus détaillé de ces témoignages ; il émane d’un auteur particulièrement compétent, d’Al Bitrogi.

Dès l’introduction de sa Théorie des planètes[3], Al Bitrogi nomme Al Zarkali : « Tous les modernes, dit-il, ont suivi Ptolémée, aucun n’a combattu ses affirmations, si ce n’est le célèbre Alzarcala au sujet du mouvement de l’orbe des étoiles fixes, et le fils d’Aflah de Séville à propos de l’ordre des orbes du Soleil, de Vénus et de Mercure ».

Là où la version de Calo Calonymos donne le nom abrégé Alzarcala, la version de Michel Scot donne[4] : « Abu Isac Abrahim Enewah winolus Zarques », mots où l’on reconnaît : Abou Ishac Ibrahim ben Iahia cognominatus Zarkala. La version hébraïque

  1. Ce n’est pas Al Mamoun Yahyé (1061-1076) qui fut chassé de Tolède par Alphonse VI ; il eut pour successeur Alcadir-Bihahou Hacham (1076-1081) ; à celui-ci succéda Yahyé à qui, en 1085, les chrétiens enlevèrent son royaume. Notre annotateur a commis une confusion entre les deux Yahyé.
  2. Il y a ici une erreur manifeste ; Masciallah vivait en la première moitié du ixe siècle.
  3. Alpetragii Arabi Theorica planetarum, fol. 2, recto.
  4. Jourdain, Recherches critiques sur l’âqe et l’origine des traductions latines d’Artistote, p. 508.