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LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

La sixième question de Chosroës portait sur les marées et sur la salure de la mer ; à plusieurs reprises, Priscien déclare qu’il emprunte à Posidonius ce qu’il dit du flux et du reflux ; il est probable, cependant, que l’emprunt n’était pas direct ; dans le préambule qui ouvre son écrit, Priscien énumère les ouvrages qu’il a consultés[1] ; il ne nomme pas le Περὶ Ὠϰεανοῦ, mais seulement composé par Géminus, des Météores de Posidonius ; le traité De l’Océan était peut-être déjà perdu, comme l’étaient les Météores.

Voici quel était, au dire de Strabon[2], l’enseignement de Posidonius au sujet des marées :

« Il dit que le mouvement de l’Océan est soumis au mouvement périodique des astres (φησὶ δὲ τὴν τοῦ ὠϰεανοῦ ϰίνησιν ὑπέχειν ἀστροείδῆ περίοδον). Il y a une période diurne, une période mensuelle, une période annuelle qui, toutes trois, sont en connexion (συμπαθῶς) avec la Lune.

» Lorsque la Lune s’élève au-dessus de l’horizon à la hauteur d’un signe (30°), on voit que la mer commence à se gonfler et à s’avancer sur le rivage, jusqu’au moment où la Lune atteint le méridien ; l’astre descendant ensuite, la mer se retire peu à peu, jusqu’à ce que la Lune se trouve à un signe au-dessus de son coucher ; pendant tout le temps que la Lune met à atteindre son coucher, la mer demeure immobile ; il en est encore de même pendant le temps, égal à celui-là, qu’il faut à la Lune pour arriver, au-dessous de la terre, à un signe de l’horizon ; alors, la mer commence de nouveau à s’avancer jusqu’au moment où, sous la terre, la Lune passe au méridien ; elle se retire jusqu’à ce que la Lune, avant son lever, arrive à un signe de l’horizon ; enfin, elle demeure immobile jusqu’à ce que la Lune monte à la hauteur d’un signe au-dessus de l’horizon ; puis elle monte de nouveau.

» Voilà donc, au dire de Posidonius, quelle est la période diurne. La période mensuelle est la suivante : Les marées atteignent leur maximum au moment de la conjonction ; elles diminuent jusqu’au premier quartier, augmentent jusqu’à la pleine lune et diminuent, de nouveau, jusqu’au dernier quartier ; puis elles augmentent jusqu’à la nouvelle-lune…

» Quant à la période annuelle, il la connaît, dit-il, par les observations des habitants de Gadès (Cadix). Ceux-ci prétendent que le flux comme le reflux sont grandement accrus au voisinage

  1. Plotini Enneades…, éd. cit., p. 553, col. b.
  2. Strabonis Geographica, lib. III, cap. V, 8 : éd. cit., p. 144.