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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

du solstice d’été : Posidonius on tire cette conjecture que les marées diminuent sans cesse dans le temps qui s’écoule du solstice [d’été] jusqu’à l’équinoxe [d’automne], qu’elles augmentent jusqu’au solstice d’hiver, puis diminuent jusqu’à l’équinoxe de printemps, pour augmenter enfin jusqu’au solstice d’été. »

Très exacte en ce qui concerne la période diurne et la période mensuelle, la description de Posidonius ne l’est plus au sujet de la période annuelle ; c’est au voisinage des équinoxes, mm des solstices, que se produisent les plus fortes marées. Les habitants de Cadix auraient-ils fourni à Posidonius des renseignements inexacts ? Ou bien Strabon, en résumant le traité De l’Océan, aurait-il interverti les rôles des solstices et des équinoxes ? Cette dernière supposition est la plus vraisemblable. Sénèque, en effet, et Pline l’Ancien parleront exactement des marées équinoxiales ; or toute leur science au sujet du flux et du reflux paraît empruntée à Posidonius. Cette supposition, d’ailleurs le philosophe Priscien va la transformer en certitude.

De la période diurne de la marée, Priscien emprunte à Posidonius[1] une description identique à celle que Strabon a reproduite ; puis il ajoute : « Quant aux flux qui se produisent chaque mois, ils surpassent de beaucoup ceux qui se font chaque jour ; en effet, lorsque la Lune est en quartier, la mer s’avance moins et se retire également moins ; lorsqu’au contraire la Lune est en conjonction avec le Soleil, et aussi à la pleine-lune, l’Océan est fortement soulevé ; le flux se montre animé d’une grande vitesse et couvre une grande étendue de terre. Il y a aussi, dans les marées, un certain rapport qui se reproduit chaque année et qu’on peut exprimer ainsi[2] : Au voisinage des solstices, l’eau s’avance en moins grande quantité et le flux en est plus lent ; mais au voisinage des équinoxes, ta mer éprouve quelque chose de semblable à ce qui paraît s’y produire au voisinage des pleines-lunos et des conjonctions. » Cette dernière phrase ne nous permet plus de douter que Posidonius n’ait eu, de la période annuelle des marées, une connaissance exacte.

Posidonius enseignait[3], comme Ératosthène, que les mers intérieures, la Méditerranée par exemple, éprouvaient le retentissement des marées océaniques ; à ce retentissement, il attribuait, comme Ératosthène, les changements diurnes de la direction du

  1. Prisciani philosophi Solutines, quæst. VI ; éd. cit., p, 571, col. a.
  2. La phrase que nous venons d’écrire paraphrase un passage à peu près inintelligible.
  3. Priscien, loc. cit., éd. cit., p. 570.