Page:Duhem - Le Système du Monde, tome II.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

Une opinion analogue était professée par les obscurs faussaires auxquels nous devons les livres pseudo-hermétiques ; dans le Poimandres, le légendaire Hermès Trismégiste s’exprime en ces termes[1] :

« Pensée-Dieu, abondant aux deux sexes, estant vie et lumière, comme aucteur, a produict avec son Verbe l’autre pensée opérante, laquelle estant dieu de feu et d’esprit, a basty sept certains gouverneurs, comprenante par leurs cercles le monde sensible : et leur disposition est nommée fatalle destinée. »

Les devins chaldéens eux-mêmes ne professaient pas tous les doctrines dont s’indignait Philon. Diodore de Sicile nous en fait connaître qui ne partagent pas le l’athéisme des premiers.

« Les Chaldéens, dit-il[2], enseignent que la nature du Monde est éternelle ; elle n’a point, au commencement, connu la génération, et, dans l’avenir, elle n’éprouvera pas la destruction. Ils enseignent aussi que l’ordre et l’harmonie de l’Univers sont dus à une providence divine ; les divers êtres qui se trouvent aujourd’hui au ciel n’y ont pas été disposés au hasard, non plus que par leur propre action ; ils ont été disposés par une décision que les dieux ont bien déterminée et fermement arrêtée.

» Ils sont, de tous les hommes, ceux qui ont fait, des astres, les plus longues observations, ceux qui ont appris à connaître, avec le plus d’exactitude, les mouvements et les puissances de chacun de ces corps ; aussi prédisent-ils aux hommes nombre d’événements qui leur doivent arriver.

» Ils disent qu’il faut surtout observer, car c’est eux qui possèdent la plus grande puissance, les cinq astres nommés errants ; aussi leur donnent-ils, en commun, le nom d’interprètes (ἑρμηνεῖς).

» … Voici pourquoi ils leur donnent le nom d’interprètes :

» Les autres astres sont des astres inerrants ; d’une allure parfaitement régulière, ils accomplissent tous une même circulation ; seuls, les cinq astres errants accomplissent, chacun, une course particulière : seuls, donc, ils indiquent ce qui doit arriver et sont, auprès des hommes, les interprètes de la pensée des dieux. »

« Chacun des astres errants, reprend Diodore[3], afin de déve-

  1. Le Pimandre de Mercure Trismégiste nouvellement traduict de l’exemplaire grec restitué, en langue françoyse, Par Françoys Monsieur de Foyx de la famille de Candalle, À la Royne mère du Roy très-chrestien Henry troisiesme. A. Bourdeaus. par Simon Millanges, rue S. Iamme, près la maison de la ville, MDLXXIIII. Ch. I, sect. I, 9.
  2. Diodori Siculi Bibliothecœ historicœ, lib. Il, cap. XXX (Dionont Sicui.t Bibliothecœ historicœ quæ supersunt. Ed. Carolus Mulierus. Vol. I, Parisiis, Firmiu Didot, MDCCCLV, p. 104).
  3. Diodori Siculi Op. laud., lib. II, cap. XXXI : éd. cit., vol. I, p. 105.