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LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

Mais une autre opinion semble également capable d’être soutenue. On peut prétendre « que la puissance céleste est la cause qui engendre même les corps simples, qui en produit la forme et la nature. Par sa raison même, la matière est dénuée de toute nature et de toute qualité ; c’est la puissance émanée des corps célestes qui en fait un corps en acte, qui lui confère figure et forme. Selon sa proximité plus ou moins grande au corps divin, cette matière participe plus ou moins à la puissance divine, et elle est plus ou moins informée par la chaleur et la sécheresse ; ce sont là, en effet, les premières passions que les corps divins mettent dans les choses mortelles. »

Diversement disposées à l’égard de la circulation céleste, les diverses parties de la matière recevront, dans telle ou telle mesure, soit ces qualités, soit les qualités contraires ; en parcourant le Zodiaque, le Soleil, la Lune, les autres astres errants, conféreront la chaleur et la sécheresse aux parties de la matière qui se présentent à eux de meilleure façon et de plus près ; ces parties-là deviendront le feu ; ailleurs, les astres mettront la chaleur et l’humidité qui constituent la nature de l’air ; ici, par l’humidité et le froid, ils engendreront l’eau ; là, par le froid et la sécheresse, ils produiront la terre.

Ainsi, les formes imposées à la matière toute simple et toute nue par la puissance émanée des corps célestes deviendront les formes premières des éléments et les causes de leurs natures propres. Mais cela n’empêchera point que celle même puissance n’intervienne, lors de la combinaison de ces corps simples entre eux, pour conférer une plus grande perfection aux mixtes qui en résultent ; de cette intervention, ou pourra répéter ce qu’en admettait la précédente opinion.

« Parmi les corps simples, en effet, il en est de plus subtils et de plus actifs ; ce sont ceux qui confinent de plus près au mouvement des corps divins ; il en est, aussi, de plus denses et de plus passifs, parce qu’ils sont plus distants de la circulation céleste, Tout mixte qui, dans le mélange ou dans la combinaison qui l’a engendré, contient une plus forte proportion des corps les plus subtils et les plus purs, possède aussi une forme plus parfaite ; tout mixte qui contient moins de ces corps, mais renferme davantage de substance passive et plus dense, reçoit une forme moins parfaite. »

La dernière opinion qui ait été ici exposée avait, sans doute, la préférence d’Alexandre. En effet, dans son traité Sur le mélange