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LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

Proclus va retentir bien longtemps aux oreilles des chercheurs de pierre philosophale ; il sera maintes fois répété par les sages de l’Islam et de la Chrétienté ; de ces nombreuses résonnances, écoutons seulement celle que les Frères de la Pureté et de la Sincérité nous font entendre dans le cinquième traité de leur encyclopédie.

« Tout ce qui est et subsiste au-dessous de la sphère de la Lune, nous disent ces auteurs[1], a quatre causes : Une cause matérielle, une cause formelle, une cause créatrice et une cause finale. » Pour les substances minérales, la cause créatrice, c’est la Nature… La cause matérielle, c’est le soufre et le vif argent… La cause formelle, c’est la rotation du Ciel et les mouvements des astres autour des quatre éléments. Enfin, la cause finale, c’est l’usage que l’homme, et les animaux en général, font des substances minérales. »

Or, à l’appui de ces principes généraux, quels exemples les Frères de la Pureté nous donnent-ils de l’action exercée, sur les substances minérales, par la rotation du Ciel et par les mouvements des astres ?

Ils nous rappellent, d’abord[2] que, par leur mouvement propre, les étoiles fixes se déplacent d’un signe en 3000 ans, et que ce déplacement entraîne de grands changements dans la disposition de la terre et des mers[3].

Puis ils nous donnent cet enseignement[4] : « Si les mers sont mises en mouvement à des époques déterminées, la cause en est que le mouvement des mers est en relation avec la configuration de la sphère céleste et des constellations ; ce mouvement a rapport avec l’incidence, à la surface de ces mers, des rayons partis des diverses directions célestes et des quatre points cardinaux de la tente du ciel ; il a rapport, enfin, aux étoiles avec lesquelles la Lune est en conjonction, tandis qu’elle s’attarde en chacune de ses 28 stations. Tout cela est exposé dans les livres d’Astrologie. »

La Lune, en effet, émet des rayons qui pénètrent les eaux de la mer jusqu’au fond de roche qu’elles recouvrent ; « traversées par ces rayons, ces eaux deviennent brûlantes ou, tout au moins, chaudes ; elles se raréfient et cherchent à occuper plus de place ; elles se gonflent alors », et le flux a lieu. De la loi suivant

  1. {{sc|Friedrich Dieterici}, Die Naturanschauung und Naturphilosophie der Araber in X. Jahrhundert. 2te Ausgabe, Leipzig, 1876 : p. 97.
  2. F. Dieterici. Op. laud., pp. 99-100.
  3. Nous avons rapporté plus haut (pp. 218-220) ce qu’ils en disent.
  4. F. Dieterici, Op. laud., éd. cit., pp. 103-104.