avec la terre, les corps qui en ont été arrachés et qui, par la suite, y retombent. De même, en effet, que le Soleil ramène vers lui les parties qui le constituent, de même la terre prend une pierre parce qu’elle lui est propre et lui convient ; elle tire (φέρει) pour ainsi dire (πῶς) cette pierre ; aussi, au cours du temps, toutes les pierres viennent-elles s’unir naturellement à elle.
» Que si quelque corps n’a pas été, dès le début du Monde, attribué à la terre, s’il ne lui a pas été arraché, s’il possède, par lui-même, une subsistance et une nature particulières — et c’est ainsi que les physiciens dont nous parlons conçoivent la Lune — qu’est-ce qui l’empêche d’exister et de demeurer autour de lui-même, par la compression et la liaison mutuelles de ses propres parties ? On n’a pas démontré, en effet, que la terre soit le centre de l’Univers. La façon dont les corps d’ici bas sont unis et conjoints à la terre nous conduit à concevoir la cause probable qui maintient sur la Lune les corps qui lui sont unis. »
Cette doctrine fait évanouir toutes les objections que le Péripatétisme avait dressées contre la pluralité des mondes.
« Chacun des mondes a une terre et une mer[1] ; chacun d’eux a son centre particulier (ἔχει γὰρ ϰαὶ μέσον ἕϰαστος ἴδιον) ; les corps de chacun de ces mondes ont leurs affections propres, leurs transformations, leur nature, leur force ; cette nature et cette force sauvent et gardent chacun d’eux à sa place. En effet, ce qui est hors du Monde, ce n’est rien ou c’est le vide ; partant, comme nous l’avons dit, cela ne fournit pas de centre. Mais s’il y a plusieurs mondes, chacun d’eux a son centre particulier ; il y a donc, au sein de chacun de ces mondes, des mouvements propres, vers le centre pour certains corps, à partir du centre pour d’autres corps, autour du centre pour d’autres encore, tout comme le disent » Aristote et les Stoïciens. Seulement tandis que ceux-ci rapportent ces mouvements à un centre absolu qui est illusoire, Plutarque n’y voit que mouvements relatifs aux corps d’un même monde.
D’ailleurs, les corps qui n’appartiennent pas à un monde n’ont, dans leurs mouvements, aucun égard au centre de ce monde. « Comment une pierre placée hors d’un monde[2] se mouvrait-elle vers ce monde, à la façon des autres graves, si elle n’est pas partie de ce monde ? » Déclarons donc que la Lune est une terre céleste, sans craindre, avec Aristote, qu’elle soit contrainte de