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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

Que cette attraction produise deux flux, l’un qui suit la Lune et l’autre qui lui est opposé, c’est ce que notre auteur déclare très nettement, mais ce qu’il n’explique pas.

Très clairement, aussi, il indique comment on calculera, chaque jour, les heures des deux flots et des deux jusants, en supposant que les flots coïncident avec le lever et avec le coucher de la Lune, que les jusants aient lieu exactement aux deux passages au méridien. Du retard qui sépare le flot ou le jusant du phénomène astronomique auquel il correspond, il ne dit rien ; nous avons vu, cependant, que Pline avait déjà signalé ce retard.

Le chapitre que nous analysons renferme encore quelques remarques intéressantes ; en premier lieu, celle-ci :

« Diverses personnes croient que ces flux et reflux se produisent également dans certaines eaux douces ; c’est ce qui semble avoir lieu auprès de certaines villes maritimes d’Éthiopie, et aussi de France ou d’Allemagne. Mais ces personnes ont été trompées par le voisinage de la mer. Lorsque des eaux douces se jettent dans la mer et sont contiguës aux eaux de la mer, elles sont repoussées par la marée qui monte de la mer ; elles coulent alors à pleins bords et paraissent s’élever. »

Albumasar dit encore :

» L’eau du flux est plus chaude et l’eau du reflux plus froide. Au moment du flux, en effet, les eaux sortent en bouillonnant du fond de l’abîme ; au moment du reflux, répandues au dehors, elles se sont refroidies. »

Cette explication repose sur l’opinion, fort répandue dans l’Antiquité et au Moyen Âge, que les eaux de la mer sont, au fond, plus chaudes qu’à la surface.

Le chapitre suivant est particulièrement important, car Abou Masar y étudie les diverses périodes, autres que la période diurne, de la marée[1].


« Chapitre VI. De l’augmentation et de la diminution des eaux.

» Dans ce qui précède, nous avons dit qu’en chacun des deux hémisphères, le flux avait naturellement une durée égale à celle du reflux. Mais, de temps à autres, se présentent certaines inégalités dont il nous faut maintenant disserter.

» Dans chacun des deux hémisphères, l’inégalité entre le flux et le reflux est mesurée par la même quantité de temps, mais de telle façon que l’ensemble du flux et du reflux dans un hémisphère

  1. Albumasaris Introductarium, lib. III, cap. VI ; éd. cit., fol sign. c. 2 ro et vo ; fol sign. c. 3, ro et vo.