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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

Apulée se propose de suivre « Aristote, le plus sage et le plus savant des philosophes, et Théophraste, qui fait autorité ». Dans ce traité, il présente un extrait, concis et vide d’idées, des deux écrits du Stagirite Sur le Ciel et Sur les météores ; il y joint une Théologie où le Platonisme règne et, d’où le Péripatétisme a été chassé. Ce sont ces très pauvres ouvrages d’exposition que le plus philosophe des Pères de l’Église ne craignait pas de mettre sur le même rang que les œuvres des créateurs ; il est vrai qu’Apulée était son compatriote.

Saint Augustin nous apprend[1] que les Latins avaient traduit dans leur langue des écrits platoniciens, et qu’ils avaient, par là, grandement, contribué à la vogue de ces écrits. Cette indication nous engage à rechercher quelles étaient ces traductions latines d’œuvres platoniciennes, auxquelles recouraient les Chrétiens peu versés dans la langue grecque. Nous en pouvons citer au moins une, qui semble avoir été consultée par certains Pères de l’Église, en attendant qu’elle devînt une des sources où le Moyen Âge latin puisera la connaissance de la Philosophie grecque ; c’est la version du premier livre du Timée, que Chalcidius avait faite et qu’il avait accompagnée d’un commentaire.

De la vie de ce Chalcidius, on ne sait rien. Son commentaire est dédié à un certain Osius ; un Osius, évêque de Cordoue, prenait part, en 325, au concile de Nicée ; il est devenu Saint Osius ; ces deux Osius sont-ils le même personnage ? Il est permis de le supposer. Si cette supposition est exacte (mais rien n’oblige à la croire telle), elle nous apprend que le commentaire de Chalcidius a dû être composé au début du ive siècle ; en outre, elle nous conduit à penser que l’auteur de ce commentaire était chrétien.

La lecture du Commentaire au Timée ne confirme pas pleinement cette dernière conclusion.

Assurément, elle nous montre que l’auteur connaissait fort bien la Bible et que les enseignements de ce livre se présentaient souvent à son esprit. Nous le voyons citer[2] certaines prescriptions de la loi hébraïque, remarquer[3] certaines concordances entre la philosophie des Hébreux et celle de Platon, rappeler[4] que, selon Moïse, Dieu avait défendu « aux premiers nés de la vie » de manger

  1. S. Aurelii Augustini Op. laud., lib. VIII, cap. X. — Confessionnes, lib. VII, cap. IX.
  2. Chalcidii V. C. Commentarius in Timœum Platonis, CCXVII philosophorum grœcorum. Collegit F. G. A. Mullachius, vol. II, p. 226. Parisiis, A. Firmin-Didot, 1867).
  3. Chalcidii Op. laud., CCLIV ; loc. cit., p. 235.
  4. Chalcidii Op. laud., IXGUI ; loc. cit., p. 215.