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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

chacun de ces éléments au suivant, il y a un symbole ; l’eau est humide et froide, la terre froide et sèche, le feu sec et chaud. On voit donc que la génération cyclique est celle qui convient le mieux aux corps simples. »

Mais si Chalcidius s’est inspiré de cette doctrine d’Aristote, il ne semble pas que ce soit d’une manière directe ; ce qu’il a dit de la transmutation des éléments les mis dans les autres, il l’a presque textuellement emprunté à un écrit qui reflétait la pensée péripatéticienne.

L’écrit dont nous voulons parler est un petit traité grec intitulé : De la naissance de l’Univers, Περὶ τᾶς τῶ παντὸς γενέσιος, ou, selon Stobée[1], De la nature de l’Univers, Περὶ τᾶς τῶ παντὸς φύσιος. Il est donné sous le nom du pythagoricien Ocellus de Lucanie ; mais il ne paraît guère possible d’en soutenir l’authenticité ; plusieurs indices le marquent comme postérieur au Stagirite, dont il paraît avoir subi l’influence[2].

C’est, en particulier, à cette influence qu’il faudrait attribuer ce que le faux Ocellus nous dit de la transmutation des éléments. Extrayons quelques passages de son exposition[3], qu’il semble avoir rendue diffuse à plaisir.

Notre auteur vient de formuler cette proposition que « la substance des choses est immuable et perpétuelle, car elle ne saurait être transmuée d’un état pire en un état meilleur ni d’un état meilleur en un état pire »… « Dans la partie de l’Univers qui est soumise à la génération et à la corruption, doit nécessairement se trouver un corps premier qui réside en tous les êtres sujets à la génération et à la destruction. » Ce corps premier, Ocellus le décrit en des termes tels qu’on y reconnaisse sans peine la matière première d’Aristote ; il le montre privé de toute qualité ; il en donne cette définition toute péripatéticienne : « Dans ce corps, toutes les choses sont en puissance avant qu’elles ne soient engendrées ; elles y sont en acte aussitôt qu’elles ont été engendrées. Avant donc qu’aucune génération ne se produise, il faut que ce premier être soit, à titre de sujet de la génération ».

Mais en outre, pour qu’il y ait génération et corruption, il faut qu’il existe des qualités contraires les unes aux autres. Ces qua-

  1. Stobaei Eclogarum physicarum lib. I, cap. XX ; éd. Meineke, p. 117.
  2. Th. H. Martin, Études sur le Timée de Platon, Paris, 1841 ; note XXXVIII, § 3 ; tome II, p. 146.
  3. De mundo Aristotelis lib. I, Philonis lib. I, Gulielmo Budœo interprete. Ocelli Lucani, veteris philosophi, libellus de universi natura. Annotatiunculœ in libellum Aristotelis de Mundo, Simone Grynæo authore. In fine : Parisiis. Apud lacobum Bogardum, 1542 ; foll. 47, vo, à 50, vo.