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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


IX
LES PÈRES DE L’ÉGLISE ET LES PRINCIPES DE L’ASTROLOGIE

S’il est un terrain où devaient nécessairement se battre les Théologies astrolâtriques du Paganisme et la Théologie chrétienne, c’est assurément le terrain de l’Astrologie. La théorie de la Grande Année, d’ailleurs, n’était que le dogme le plus éminent de l’Astrologie ; les discussions que nous venons de rapporter ne sont qu’un épisode de la grande bataille entre l’Astrologie et le Christianisme.

Nous avons dit, au § I, avec quelle fermeté, avec quelle unanimité, les Pères de l’Église avaient lancé l’anathème sur les pratiques des tireurs d’horoscopes ; mais ces pratiques, ils ne se sont pas contentés de les condamner au nom de l’orthodoxie ; ils ont entrepris de démontrer, par arguments philosophiques, qu’elles étaient incapables d’acquérir la prescience dont elles se targuaient.

Des Pères de l’Église, aucun n’a critiqué les principes de l’Astrologie avec autant de pénétration que Saint Augustin. Sa discussion dépasse de beaucoup en profondeur celle que Cicéron tenait de Panétius et celle qu’Aulu-Gelle empruntait à Favorinus.

Nous savons[1] par les Confessions que Saint Augustin, dans sa jeunesse, avait éprouvé de la curiosité pour l’Astrologie judiciaire ; il s’en était, d’ailleurs, informé auprès des plus savants auteurs, par exemple, du « stoïcien Posidonius, qui était fort adonné à l’Astrologie[2] », « qui était, à la fois, philosophe et grand astrologue[3] ».

Posidonius avait appris à Saint Augustin que la disposition des planètes par rapport aux étoiles fixes au jour où naît un enfant, au jour où s’accomplit une action, détermine entièrement le sort qui attend cet enfant durant sa vie, l’effet que cette action produira au cours des ans. Il lui avait appris, en même temps, que ces horoscopes trouvaient, leur justification dans l’axiome formulé par Aristote au Traité des Météores[4]. « Pour tout acte à accomplir, disaient les astrologues dont L’Évêque d’Hip-

  1. Vide supra, § I, p. 404.
  2. S. Aurelii Augustini De Civitate Dei lib. V, cap. II.
  3. S. Aurelii Augustini Op. laud., ibid.
  4. Voir : Première partie, ch. IV, § V ; t, I, p. 164.