Page:Duhem - Le Système du Monde, tome II.djvu/488

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
482
L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

néanmoins disposés suivant un ordre si opportun qu’ils se pussent joindre aisément. En chacun, d’eux, il existe deux qualités ; à chaque élément, Dieu a donné une de ces deux qualités, telle qu’il en trouvât une pareille et semblable dans l’élément auquel il viendrait adhérer. La terre est sèche et froide, tandis que l’eau est froide et humide ; bien, donc, que ces deux éléments soient contraires l’un à l’autre par le sec et l’humide, ils sont unis par le froid qui leur est commun. L’air humide et chaud s’oppose par sa chaleur à l’eau froide ; mais il s’accorde et s’unit avec elle parce qu’il en partage l’humidité. Au-dessus de l’air se trouve le feu, sec et chaud ; la sécheresse du feu répugne à l’humidité de l’air ; mais le feu est relié à l’air par la chaleur qui les associe. Ainsi, chacun des éléments saisit, par l’une de ses qualités l’un des deux éléments voisins ; il semble qu’il les embrasse en donnant un bras à chacun d’eux. L’eau s’attache la terre par le froid et l’air par l’humide ; l’air s’unit à l’eau, à laquelle il ressemble par l’humidité, tandis qu’il s’associe au feu par la chaleur ; la terre souffre, grâce à la sécheresse, l’union avec le feu, tandis que le froid l’empêche de repousser l’eau. »

Macrobe, à ce propos, invoque le Timée de Platon, c’est-à-dire, sans doute, le Commentaire de Chalcidius sur cet ouvrage ; mais c’est surtout la pensée de Saint Basile qu’il expose, et les métaphores qu’il emploie sont presque textuellement empruntées à ce Père de l’Église.

Grégoire de Nysse ne semble pas aussi soucieux de Physique péripatéticienne que son frère Basile. Sans aucune discussion, il admet[1] que le Ciel est formé de feu. Le feu, qui, par nature, tend à gagner avec une grande rapidité la région la plus élevée du Monde, « se met nécessairement à tourner en cercle lorsqu’il atteint cette région. Sa force naturelle, en effet, l’oblige à se mouvoir en même temps que l’Univers ; d’autre part, le lieu lui fait défaut pour se mouvoir en ligne droite, puisque ses limites sont celles mêmes des choses sensibles, et que les choses conçues seulement par l’esprit ne peuvent livrer passage au mouvement du feu ; lors donc qu’il se trouve convenablement logé dans la suprême région du Monde, il y tourne en cercle ».

L’Évêque de Nysse ne dit rien, dans son livre sur l’Hexameronmeron, ni des quatre éléments ni des unions qu’ils peuvent contracter. Mais il en est autrement dans son livre Sur la création de l’homme.

  1. S. Gregorii Episcopi Nysseni In Heæaemeron liber [S. Gregorii Episcopi Nysseni Opera accurante Migne, tomus I (Patrologiœ grœcœ tomus XLIV). coJl. 75-78].