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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/209

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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

Que les côtes de la Provence et du Languedoc, dont les ports nombreux entretenaient, par leur commerce, d’incessantes relations avec les pays d’Islam, aient été comme ouvertes à la pénétration de la Science arabe, nous ne saurions nous en étonner. Que cette pénétration y ait été particulièrement précoce et profonde, nous en aurons l’assurance lorsque nous aurons étudié l’œuvre accomplie par un astronome dont le nom nous demeure inconnu, en la ville de Marseille, au milieu du xiie siècle, avant donc que Gérard de Crémone ne se rendit en pays d’Islam à la conquête de l’Almageste.

Un manuscrit de la Bibliothèque Nationale, autrefois propriété de l’Abbaye de Saint-Victor, au milieu de plusieurs écrits d’Astrologie, contient un traité d’Astronomie [1] qui débute, sans aucun titre, en ces termes :

« Ad honorem et laudem nominis Domini nostri, Patris et Filii et Spiritus Sancti, qui, cum sit Deus unus in trinitate perfecta, nichilominus Deus trinus in unitate individua credendus atque colendus est. Omnis creatura linguam in præconia solvat et Creatorem in suis operibus inimitabilem prœdicet. »

Cette pieuse invocation est suivie d’un éloge dithyrambique de l’Astronomie, éloge dont les variations se modulent sur ce thème [2] : « À tout homme qui ignore les merveilles des cieux, on devrait plutôt refuser le nom d’homme, et le ranger au nombre des êtres privés de raison ».

C’est d’Astronomie, donc, que l’auteur veut nous entretenir. Quelle sorte de livre a-t-il prétention d’écrire ? Il va nous le dire [3] :

« Si, comme nous l’espérons, Dieu y consent, nous nous efforcerons de composer un livre sur le cours des planètes, calculé pour notre pays (juxta terræ nostræ situm cursuum librum). Ce livre, nous le composons en l’honneur de Jésus-Christ, homme, médiateur de Dieu et des hommes, à qui nous vouons toute cette œuvre, en sa qualité de souverain Ouvrier de toutes choses ; nous le composons aussi pour Futilité commune dé toute la Latinité (in… omnis Latinitatis utilitatem communem), Donc, en l’an 1111 depuis l’incarnation du Seigneur, nous avons commencé à écrire ce livre calculé pour notre cité, c’est-à-dire pour Marseille (Anno enim ab incarnato Domino MoCoXoIo hunc librum super nostram civitatem, id est Massiliam, scribere cœpimus). Nous n’avons voulu

1. Bibliothèque Nationale, fonds latin, ms» n° fol. ïio, col. a, à fol. 135, vo.

2. Ms. cit., fol. tio, col. a.

3. Ma. cit., fol. no, col. c.

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