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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/464

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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS


qui entraîne tous les orbes inférieurs, est le centre absolu (simpliciter) ; mais les centres autour desquels tournent les orbes inférieurs sont des centres relatifs (secundum quid) ».

Frère Bernard adhère donc avec pleine confiance au système des excentriques et des épieycles de Ptolémée ; mais il y adhère à la condition que ces excentriques, que ces épicycles seront matériellement réalisés au moyen d’orbes solides et contigus ; par cet artifice, en effet, il devient aisé de réfuter la plupart des objections d’Averroès et de ses continuateurs contre l’Astronomie de l’Almageste.

L’Astronome franciscain sait fort bien, d’ailleurs, que la théorie de certaines planètes ne peut être convenablement représentée par le mécanisme simple qu’il a décrit tout d’abord ; dans ces cas particuliers, il a soin d’indiquer comment ce mécanisme devra être complété en vue de figurer exactement les mouvements reconnus par les observateurs.

Pour représenter, par exemple, le déplacement des nœuds de l’orbitre lunaire, de la tête et de la queue du dragon, Ptolémée a dû animer l’excentrique sur lequel roule l’épicycle de la Lune d’un mouvement de rotation uniforme autour du centre du Monde. Bernard de Verdun remarque[1] qu’il faudra donc attribuer à la Lune, outre les orbes dont sont doués les autres planètes, un orbe compris entre deux surfaces sphériques concentriques au Monde.

De même, l’excentrique qui porte l’épicycle de Mercure doit être, selon la théorie de Ptolémée, animé d’un mouvement de rotation autour du centre de l’équant. Pour produire ce mouvement, Bernard de Verdun attribue[2] à Mercure « un orbe dont la convexité est concentrique au centre de l’équant ».

Que de semblables artifices suffisent à représenter tous les mouvements célestes, Frère Bernard n’en doute aucunement ; nous en aurons la preuve en étudiant ce qu’il dit du mouvement de précession des équinoxes.

En cette question, comme en sa discussion des systèmes astronomiques, Frère Bernard procède d’une manière absolument logique ; il pose d’abord les faits constatés par les observateurs ; ce sont autant d’indications auxquelles les systèmes des théoriciens devront se conformer.

  1. Fratris Bernardi de Virduno Tractatus super totam Astrologiam, tractatus IV. cap III.
  2. Fratris Bernardi de Virduno Tractatus super totam Astrologiam, tractatus VII, divisio II, cap. I.