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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — I. LES ASTRONOMES


ment un exposé des principes sur lesquels repose la construction des Tables de Tolède ; c’est aussi une critique de ces principes ; Jean de Sicile n’hésite pas à regarder l’hypothèse de l’accès et du recès, soutenue par le livre attribué à Thâbit ben Kourrah ; comme une supposition dénuée de tout fondement ; très résolument, il propose de reprendre, pour rendre compte du mouvement de la huitième sphère, une théorie analogue à celle de Ptolémée.

L’écrit de Jean de Sicile commence en ces termes :

« Cum inter cætera Philosophiæ documenta quibus intellectui splendor cognitionis acquiritur et infallibilis rerum notifia vindicatur, divinum merito constat esse præstantius, quod altiora omnia suæ considerationis universalitate præsumit et, in summi Conditoris animo perseverans, ejus amore ef notitia nos informat, ut dum hujus doctrineæ principia quærimus, omnium rerum Opificem ipsum inquirendo cognoscimus… »

Cet éloge de la Théologie est le début d’un préambule où les sciences se trouvent rangées par ordre de dignité ; dans cette classification, l’Astronomie se trouve placée immédiatement après l’étude des choses divines. Il en était de même dans la pré lace du Tractatus super totam Astrologiam de frère Bernard de Verdun, ouvrage avec lequel l’Exposition de Jean de Sicile semble présenter une grande ressemblance ; ce livre-ci, comme celui-là, paraît avoir été composé dans l’intention de défendre les doctrines de Ptolémée contre les doutes de Roger Bacon.

Lorsque Jean de Sicile décrit les diverses sphères célestes, il s’exprime en ces termes[1] : « Pour que les apparences soient sauvées et que certains inconvénients ne se présentent pas, qui sont contraires à la Philosophie naturelle, il faut qu’à chaque planète, correspondent au moins trois orbes sphériques… » Et aussitôt, l’auteur nous décrit les combinaisons de corps solides imaginées par les Hypothèses de Ptolémée.

Cette description rappelle de très près celle que Roger Bacon avait donnée dans l’Opus tertium et qu’il avait reproduite aux Communia naturalium ; comme cette dernière, elle est simplifiée à Lexcès ; à la Lune et à Mercure, elle attribue seulement, comme aux autres planètes, un épicycle dont le déférent excentrique est compris entre deux orbes ; elle ne fait aucune mention de l’orbe supplémentaire que les Hypothèses des planètes et le Résumé d’Astronomie d’Ibn al Haitam, d’abord, que le Tractatus super totam Astrologiam de Bernard de Verdun, ensuite, avaient adjoint à cha-

  1. Joannis de Sicilia Op. laud., pars principalis ; ms, cit., fol. 87, ro.