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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — II. LES PHYSICIENS

de Dieu Roy de France, désirant et amant toutes nobles sciences,

» Je, Nicole Oresme, doyen de l’église de Rouen, propose translater et exposer en françois. »

La fin du traité est la suivante[1] :

« Et ainsi, à laude de Dieu, J’ay accompli le livre du Ciel et du Monde au commandement de très excellent prince Charles Quint de ce nom par la grâce de Dieu roy de France, lequel, en ce faisant, m’a fait évesque de Lisieux.

» Et pour mieux animer, exciter et esmouvoir les cuers des joenes hommes qui ont subtilz et nobles engins et désir de science, affin que il estudient à dire encontre et à moy reprendre pour amour et affection de vérité, Je ose dire et me fais fort qu’il n’est homme mortel qui onques veist plus bel ne meilleur livre de philosophie naturelle que est cestuy, ne en hébreu, ne en grec, ne en arabic, ne en latin, ne en françoys.


» Ecce librum celi Karolo pro rege peregi.
  Regi celesti gloria, laus et honor,
  Nam naturalis liber unquam philosophie
  Pulchrior aut potior nullus in orbe fuit. »


Cette fin nous fait connaître la date à laquelle fut écrit le Traité du Ciel et du Monde ; Oresme le composait lorsqu’il fut nommé évêque de Lisieux, c’est-à-dire en 1377 ; ce fut, sans doute, sa dernière œuvre philosophique ; elle n’a jamais été imprimée.

Il ne faudrait pas, d’ailleurs, attribuer une date aussi tardive aux pensées exposées dans ce Traité ; avant de les présenter en français, Oresme les avait sans doute maintes fois, et depuis longtemps, professées ; ainsi s’explique comment ce que le Traité dit du mouvement de la Terre peut se trouver réfuté dans les Quæstiones super libris de Cælo et Mundo de Buridan, comment nombre de théories du Traité sont manifestement reproduites ou discutées dans les Quæstiones in libros de Cælo et Mundo composées en 1368 par Albert de Saxe.

Avant de commenter le Traité du Ciel et du Monde, Nicole Oresme avait composé, également en français, un Traité de la Sphère ; nu premier de ces deux traités, l’auteur cite à plusieurs reprises le second. « Et ce, dit-il[2], ai ge autrefois déclairé ou XXXIX chapitre du traictié en françois que je fis de l’espère. »

  1. Ms. cit., fol. 122, coll. a et b.
  2. Ms. cit., fol. 95, col. c.