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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

posé sous forme de calendrier. Et comme le présent opuscule a été composé à l’instance de la reine, j’ai voulu le nommer Calendrier de la Reine. Que la royale majesté daigne donc le lire ou l’écouter, et lui donner quelquefois la place d’une récréation ou d’une conversation. »

Le préambule que termine cette dédicace mériterait d’être cité en entier ; il est destine à appeler sur les travaux des savants la bienveillante sollicitude des princes ; dans ce but, Guillaume de Saint-Cloud célèbre les services que la Science a rendus aux mis ou à leurs sujets : « Nous lisons[1] qu’en maintes circonstances, l’artificieuse subtilité des savants est venue au secours d’un peuple en danger ; qu’en d’extrêmes nécessités, elle a découvert des secours merveilleux ; que ses opérations extraordinaires mit exercé un attrait délectable sur la vue de ceux qui les contemplaient ; nous lisons également que l’admirable ingéniosité de ces savants a permis aux populations d’échapper à une peste meurtrière ; nous lisons encore qu’ils ont pu manifester à l’armée adverse la présence d’ennemis absents et fort éloignés ; qu’ils ont pu, à l’aide d’un fracas d’armes étrange et nouveau, défaire la puissance des ennemis ; qu’ils ont pu, ce qui est plus étonnant, changer la qualité d’un pays en une qualité contraire.

» En effet, selon ce qu’Aristote dit au livre De proprietatibus elementorum, Socrate dressa un miroir d’acier à l’aide duquel il découvrit un dragon qui se cachait dans les cavernes des montagnes et dont l’haleine pestilentielle faisait périr les hommes et les animaux.

» Nous lisons dans l’Histoire romaine que Jules César, au moment d’envahir l’Angleterre, dressa des miroirs qui, du rivage gaulois, lui permirent d’explorer les pays anglais.

» Galien dit également, dans son livre De complexionibus, qu’en une guerre navale, Archimède incendia à l’aide de miroirs ardents les navires ennemis.

» De son côté, Pline écrit qu’en certaine partie du Monde, l’armée romaine fut vaincue par des ennemis qui lançaient du feu ; telle était la violence de ce feu que, jeté sur un soldat couvert de ses armes, il brûlait irrémédiablement le soldat et les armes.

» Dans le livre De regimine principum, nous lisons qu’Aristote a écrit à Alexandre de ne pas massacrer les habitants d’un certain pays, rebelles à son autorité, mais de modifier artificiellement la nature de leur pays ? de telle sorte que le changement du

  1. Ms. cit., fol. 145, vo.