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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — II. LES PHYSICIENS

qu’on pût trouver le véritable équinoxe de printemps ; que le début des lunaisons fût juste ; qu’on prît avec exactitude le quatorzième jour de la Lune, soit que ce jour coïncidât avec l’équinoxe, soit qu’il le suivît : que le terme de Pâques fût fixé en ce jour, et la solennité de Pâques célébrée au dimanche suivant.

» Sans attacher au calendrier un nombre d’or ou quelque autre règle fixe, on pourrait dresser des tables qui feraient connaître les équinoxes et les débuts des lunaisons ; à l’aide de ces tables, les années et les mois du calendrier pourraient être réglés par un artifice analogue à celui dont les Juifs font usage.

» Toutefois, si l’Église ne voulait pas, dès à présent, donner une correction précise du calendrier, si elle ne voulait pas, en vue de cette correction, user de quelqu’un des trois moyens que nous venons de décrire, parce qu’on les trouverait peut-être trop difficiles, au moins devrait-elle pourvoir à ceci : Que les équinoxes, les solstices, et aussi les débuts des lunaisons soient corrigés et remis aux places qu’ils doivent occuper dans le calendrier, De cette manière, en effet, c’est seulement dans un très long temps qu’ils seraient affectés d’une erreur aussi grande que celle dont ils sont maintenant entachés. En outre, contre l’erreur à venir, on pourrait remédier aisément par le moyen que nous avons indiqué au quatrième chapitre [1]. Par là, il serait pourvu, du moins jusqu’à un certain point, contre les inconvénients dont nous avons parlé, en particulier contre les moqueries des infidèles et surtout des Juifs.

» C’est un grand opprobre, en effet, c’est un honteux ridicule que de voir les Juifs procéder avec plus d’art que les Chrétiens dans ce qui concerne le culte de Dieu, Que le peuple chrétien soit donc débarrassé de ce vil opprobre ! Que la majesté apostolique, que l’autorité sacrée du concile chassent cette honte de l’Église ! Qu’elles ordonnent, quelles prescrivent strictement d’accomplir une œuvre si utile et si louable, en l’honneur et pour la gloire de Celui qui est béni dans les siècles des siècles. Amen. »

L’exhortation de Pierre d’Ailly ne fut pas écoutée.

Le pape Jean XXIII n’y demeura pas complètement sourd. Au Traité du Cardinal de Cambrai, il accorda une Approbatio[2] ; cette

  1. La suppression d’une année bissextile tous les trois cent-quatre ans, qui rétablit l’exactitude du nombre d’or.
  2. Cette Approbatio est conservée, à la suite de l’Exhortatio, dans le ms. no 5113 de la bibliothèque Impériale de Vienne. D’après ce manuscrit, elle a été imprimée, aussitôt après l’Exhortatio, par Hermann von der Hardi (Op.