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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

Approbatio décrétait certaines corrections qui devaient être apportées à la détermination du nombre d’or et à la fixation de la fête de Pâques ; mais à la réforme si grave et si urgente du calendrier solaire, elle ne faisait aucune allusion.

Quant au Concile de Constance, préoccupé surtout de mettre fin au Schisme, il n’eut pas le loisir d’examiner les problèmes relatifs à la correction du calendrier.

Si Clément VI n’accomplit pas, dès l’année 1349, la réforme du calendrier, la faute n’en fut pas à Jean de Murs et à Firmin de Belleval ; si le Concile de Constance n’ordonna pas l’accomplissement de cette œuvre, la faute n’en fut pas à Pierre d’Ailly ; il ne tint pas à l’Université de Paris que, bien longtemps avant 1582, le calendrier ne fut ramené à l’exactitude ; il est vrai qu’au jour où Grégoire XIII accomplira cette correction, prête depuis deux siècles et demi, nul ne rappellera ce qu’avait fait, pour la préparer, la grande Université parisienne.

Le témoignage de Pierre d’Ailly nous a permis de conduire presque jusqu’au temps où le Moyen Âge va finir notre emquête sur les doctrines astronomiques de l’Université de Paris. Depuis le temps où Albert le Grand inaugurait son enseignement près de cette Université, l’opinion des physiciens comme des astronomes s’y est montrée d’une singulière unité. Par tous, à l’unanimité, un même principe a été reconnu et proclamé : Pour qu’un système astronomique soit recevable, il faut, avant tout, qu’il sauve les apparences célestes dûment constatées par les observations ; il n’est pas d’argumentation philosophique ou physique qui puisse conférer une valeur quelconque à des hypothèses dont les conséquences sont en désaccord avec les faits.

Cette suprématie souveraine de l’expérience, nous l’entendons proclamer avec fermeté par un contemporain de Pierre d’Ailly, par le Franciscain Pierre Philarge, né à Candie, qui, sous le nom d’Alexandre V, devait mettre fin au Grand Schisme ; dans ses Leçons sur les Sentences [1], composées à Paris, Pierre de Candie écrivait[2] :

« Toute considération philosophique tire origine de l’expérience, qui est, pour nous, la première maîtresse. — Omnis philosophica


    laud.). M. Kaltenbrunner en a donné une analyse très détaillée (Op. laud., pp. 335-336).

  1. Bibliothèque Nationale, fonds latin, nouvelles acquisitions, no 1467, — Fol. 267, col. b. : Explicit lectura super sententias fratris Petri de Candia ordinis minoris scripta Parrisius.
  2. Petri de Candia Lectura super Sentencias, Lib. I, quæst. Va, art. 3 ; ms. cit., fol. 95, col. d.