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L’ASTRONOMIE ITALIENNE

Cette affirmation, Ristoro la répète[1] ; mais il y joint des explications bien propres à nous montrer qu’il l’a peu comprise. N’a-t-il pas la fâcheuse idée de prendre précisément pour exemple les deux seuls points de la huitième sphère auxquels elle ne s’applique pas, la tête du Cancer et la tête du Capricorne, qui glissent sans cesse sur l’écliptique fixe et, partant, gardent une latitude constamment nulle ?

« On voit, dit-il, que les étoiles iront tantôt vers le Nord et tantôt vers le Midi ; et cela peut bien être, car les savants pensent que la tête du Cancer se meut vers le Nord puis, en sens inverse, vers le Midi : en sorte qu’il est nécessaire que la tête du Capricorne la suive en un mouvement opposé. »

Cette proposition, Ristoro ne l’attribue pas seulement à « certains savants » ; il vient nous affirmer qu’il l’a vérifiée par l’observation !

« Nous pourrions jurer en toute sûreté (E potremo guirare salvamente) que, de nos jours, nous avons trouvé que la tête du Cancer s’était déplacée et s’était abaissée du Nord vers le Midi. »

Notre auteur, cependant, a eu en mains des tables du mouvement de la huitième sphère, probablement les Tables de Tolède.

« Pour connaître ce mouvement de la huitième sphère, dit-il[2], les savants ont fait des tables ; on y inscrit les noms [des diverses étoiles et, au-dessous, on inscrit les tables du mouvement, et de la marche directe, et de la marche rétrograde ; par ces tables, on commit ce mouvement, et l’on trouve, par ces tables, qu’il a une amplitude de dix degrés. »

Comment le mouvement de la huitième sphère oblige à concevoir, au-dessus d’elle, une sphère qu’anime le seul mouvement diurne, Ristoro va nous te dire[3] ; sa claire explication nous rappellera certaines considérations de Simplicius : « Si nous voulons connaître la grandeur du mouvement d’une chose qui se meut, il nous faut trouver une autre chose qui demeure lixe et qui ne se meuve point ; autrement, la grandeur du mouvement ne se peut connaître. Si donc nous voulons connaître la grandeur du mouvement de la huitième sphère vers l’Oceident [le mouvement diurne], il faut que nous concevions comme terme un cercle qui demeure fixe, et que nous nommons l’horizon ; à l’aide de ce cercle, qui demeure immobile, nous pouvons connaître ce mouvement de la huitième sphère vers l’Occident.

  1. Ristoro d’Arezzo, Op. laud.. lib. I, cap. XVII ; éd. cit., pp. 28-29.
  2. Ristoro d’Arezzo, Op. laud.. lib. I, cap. XVII ; éd. cit., p. 29.
  3. Ristoro d’Arezzo, Op. laud.. lib. I, cap. XVII ; éd. cit,, p. 30.