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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

» Autour de lui la lumière et l’amour forment un cercle, connue lui autour des autres, et cette ceinture, celui qui la ceint la connaît seul.

» Son mouvement n’est point mesuré par un autre, mais les autres le sont par le sien, comme dix par la moitié et le cinquième.

» Et comme le temps a dans ce vase ses racines, et dans les autres ses feuilles, peut être clair désormais. »

Ces beaux vers résument avec une rare puissance tout renseignement d Aristote touchant le premier mobile.

Le premier mobile n’a pas de lieu ; hors de lui, il n’y a que des êtres incorporels ; il n’y a ni corps ni mouvement ni temps ; il y a l’Être suprême, pure intelligence.

C’est par amour et désir de cet Être suprême que se meut le premier mobile ; par ce mouvement, il est, à son tour, en possession de la vertu motrice à l’aide de laquelle il meut tous les orbes qu’il enceint.

Le mouvement du premier mobile est la mesure de tous les autres mouvements ; il est donc le temps qui est, par définition, la mesure du mouvement.

Enfin la rotation du premier mobile requiert l’existence, au centre, d’un corps fixe ; elle est donc la raison d’être de l’immobilité de la Terre.

Après que Béatrice a rappelé ces doctrines du Péripatétisme, elle prononce ces paroles[1] :

« Mais avant que tout Janvier sorte de l’hiver, à cause du centième qu’en bas on néglige, tellement rugiront ces cercles supérieurs,

Que la fortune, si longtemps attendue, tournera les poupes où sont les proues, en sorte que la flotte courra dans la voie droite.


Ma prima che gennaio tulle si sverni,
Per la centesma ch’è laggiù neglelta,
Ruggeran si questi cherchi superni,

Che la fortuna, che tanto s’aspetta,
Le poppe volgerà u son le prore,
Si che la classe correrà dirella. »

La première partie de l’allusion est absolument claire ; « la centesma ch’è laggiù negletta, » c’est l’excès de l’année julienne

  1. Dante Alighiehi, Op. laud., XXVII, 142-148 ; éd. cit., p. 479.