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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


des étoiles fixes ; ils n’allaient pas tarder à rapprendre, et Guillaume de Saint-Cloud ne devait pas être le dernier à le savoir.

Le manuscrit qui nous a conservé les traités de Jean de Sicile et de Guillaume de Saint-Cloud contient une pièce anonyme intitulée[1] : Expositio intentionis regis Alfonsi circa tabulas ejus. S’il ne nous est pas possible de désigner l’auteur de cette pièce, nous en pouvons, du moins, fixer la date ; au chapitre qui décrit le mouvement de la huitième sphère, nous lisons, en effet, ces mots[2] : « Sed modo, anno Christi 1300 perfecto, est… » C’est donc en l’année 1301 que fut écrite cette Exposition de l’intention selon laquelle le roi Alphonse a composé ses tables.

Cette Exposition débute ainsi[3] :

« Alphonse, roi de Castille, doué d’un génie florissant, fut un homme puissant en science ; il surpassait tous les autres en sagesse ; la sphère céleste tout entière, avec ses mouvements, se trouvait incluse dans rimaginatkm de ce prince qui ignorait l’erreur et ne connaissait que la vérité. Ceux qui ne savaient que balbutier au sujet des mouvements des planètes, il voulut les conduire dans une meilleure voie ; il voulut extirper les erreurs ; dans ce but, il réunit les astronomes les plus experts de toute langue et, avec eux, il composa des tables exactes et pratiques de tous les mouvements célestes que les astronomes avaient tous méconnus jusqu’alors. En outre, après avoir recueilli et comparé avec soin les imaginations diverses de ces savants et les observations des anciens, il en composa un autre ouvrage général où il garda tout ce qu’ils avaient dit de bon, après en avoir extirpé les erreurs ; à l’aide de cet ouvrage, ou peut déterminer très exactement les lieux des planètes à toute époque donnée. Mais, hélas ! il ne s’est jamais trouvé, en notre temps, de personnes pour composer sur cet ouvrage des canons à l’aide desquels nous puissions perpétuellement contrôler les lieux ainsi déterminés. Nous avons vu, il est vrai, parmi nous, un homme qui a étudié cet excellent ouvrage. Mais toutes les choses que cet ouvrage renferme demeurent comme cachées, car, déposées dans la seule intelligence de cet homme, elles ne profitent qu’à lui, comme s’il était seul à désirer les éloges ou les récompenses attachés à cet art. Pour nous, nous n’avons pas voulu qu’une telle science fût cachée aux gens studieux ; nous avons tenté, dans la mesure de nos forces.

  1. Ms. cit., fol. 156, vo à fol. 158, vo.
  2. Ms. cit., fol. 158, vo.
  3. Ms. cit., fol. 156, vo.