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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IV.djvu/320

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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

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témoignage des sens, qu’Aristote avait proclamé source de toute vérité, prouvait qu elle était fausse ; il montrait que le Soleil, la Lune, les étoiles errantes ne demeurent pas toujours à la meme distance de la Terre. Guidée par l’expérience sensible, dont, an moyen d’observations multiples cl minutieuses, elle s’attachait à recueillir les enseignements, F Astronomie construisait alors une théorie qui, jusqu’au moindre détail, sauvât les apparences ; après maint tâtonnement, elle produisait le système des excentriques et des épicycles dont V Abnaffeste nous présente l’exposé. Alors, entre la théorie des sphères homocentriques, soutenue par les fidèles sectateurs d’Aristote, et I Astronomie de Ptolémée, défendue par ceux qui se liaient au témoignage de leurs yeux plutôt qu’à la Physique péripatéticienne, la lutte s’engagea, longue et ardente ; de cette lutte, nous avons suivi les principales phases, au cours du Moyen Age islamique, juif et chrétien, jusqu’au jour où, vers l’an 1300, les doctrines astronomiques d’Averroès et d’Alpétragius ne trouvèrent plus un homme de bon sens qui consentit à les défendre.

Tandis que F Astronomie d’Aristote voyait se dresser contre (41e F Astronomie de Ptolémée, la Théologie d’Aristote, si étroitement apparentée à son Astronomie, se heurtait aux communs enseignements des trois religions qui se partageaient alors le monde civilisé : l’islamisme, le Judaïsme et le Christianisme. D’une part, Aristote et scs commentateurs les plus exacts, tels qu Alexandre d’Aphrodisias ou Averroès, enseignaient que tout dieu est une intelligence éternellement immobile, simple* moteur d’une matière première éternelle comme lui, cause première et cause finale de circulations célestes nécessaires et perpétuelles ; ils enseignaient que ces circulations déterminent, suivant une incessante périodicité, tous les événements du monde sublunaire ; (pie l’homme, inséré dans l’enchaînement <h* ce déterminisme absolu, n’a que l’illusion de la liberté ; qu’il n’a pas en lui d’âme immortelle ; ou bien qu’il est momentanément animé intellect indestructible, mais impersonnel et commun à tous les hommes.

En face de cet enseignement, la Religion juive, la chrétienne, la Religion musulmane, s’accordaient à déclarer aux hommes (pie Dieu a librement créé le Monde ; qu’il le gouverne par une toute puissante providence ; qu il a fait I homme libre, donc capable de mérite ou de démérite ; qu il lui a conféré une âme personnellement immortelle, et qu il récompensera ou punira, durant la vie future, les actes que cette âme accomplit en la vie présente*

par un

Religion