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PÉRIPATÉTISME, RELIGIONS ET SCIENCE

Entre les deux Théologies, le désaccord éclatait aux veux les moins clairvoyants. Nul ne pouvait se croire Juif, Chrétien on Musulman fidèle s’il acceptait, eu sa plénitude, la Métaphysique péripatéticienne ; nul ne pouvait admettre que la vérité fût, à la fois, révélée dans la Bible on le Coran, et démontrée dans les écrits du St r agi rite.

La Théologie donc, comme 1 Astronomie, se refusait, à voir dans la Physique et dans la Métaphysique péripatéticiennes cette universelle synthèse que l’humanité souhaitait ; Lune et l’autre proclamaient que cette synthèse restait à faire. En face d’un commun adversaire, ces deux puissances se trouvaient naturellement alliées. Lorsqu’elle sapait, au nom de T expérience sensible, l’aveugle confiance d un Averroès en la parole d’Aristote, l Astronomie mettait le Juif, le Chrétien, le Musulman en garde contre ce que cette parole professait d adverse à la foi religieuse. Lorsqu’elle condamnait les affirmations hérétiques du système péripatéticien, la Théologie des trois religions monothéistes ouvrait des brèches dans la solide muraille de ce système ; en ■J

ces brèches, la Science expérimentale trouvait un passage qu’elle élargissait au point qu’il permit sa libre expansion ; c’est pourquoi l’historien comprendrait imparfaitement l’essor (pie la Science, libérée de TAristotélisme, a pris au Moyen Age, s il ne rappelait les coups de bélier dont la Théologie a secoué les murs de la prison,

Os coups, d’ailleurs, n’ont pas seulement ébranlé les remparts du Péripatétisme. [/Hellénisme et ceux qu’inspiraient ses tendances avaient construit d’autres systèmes U

solidement bâtis, moins rigides, qu’il était plus aisé d’élargir afin d’y recevoir quelques-uns des dogmes religieux. Prisons moins étroites et moins austères que la sombre forteresse aristotélicienne, ces constructions néo-platoniciennes étaient encore des prisons, ou la raison du croyant ne trouvait pas la liberté d’admettre pleinement tous les dogmes qu’embrassait sa foi. Pour sauvegarder la foi des croyants, la Théologie n a pas hésité à faire crouler les murailles néo-platoniciennes, de la même ruine où s’effondrait la solide bâtisse du Péripatétisme. Sans répit, elle a frappé de ses anathèmes, en tous ces systèmes philosophiques, toutes les propositions qui étaient des hérésies contraires à ses enseignements ; or, parmi c<>s propositions, lien est un grand nombre qui, d’un tien indissoluble, avaient, religieuse, lié l’erreur astronomique ou physique ; en la vérité dont elle avait la garde, la Théologie a brisé phi losophiques, moins

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