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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

autre doctrine métaphysique, L Eglise catholique eût, sans doute, laissé aux physiciens et aux astronomes le soin d’en disputer ; eUe eût dédaigné de s’en occuper, afin de se consacrer aux questions qui importent au salut de l’homme. En fait, cette indifférence à l egard du problème des moteurs célestes fut, pendant longtemps, F attitude des docteurs chrétiens.

« Le monde supérieur, dit Guillaume d’Auvergne1, est-il un être animé unique ou sc compose-t-il de plusieurs êtres animés ? Les Ames de ces êtres sont-elles raisonnables ? Cela se trouve déterminé dans les écrits d*Aristote et de ceux qui ont marché a sa suite, et aussi dans ceux de nombreux philosophes italiens latins]. Mais, jusqu’à ce jour, renseignement des Juifs ni des Chrétiens ne s cst pas soucié de telles questions. » La Nation juive avait accoutumé de se contenter des livres de la Loi et des prophètes. Mais, depuis fort longtemps, elle s’est convertie à des fables incroyables et s’y est totalement adonnée, à l’exception de quelques-uns de ses membres ; ceux-ci, mêlés à la Nation sarrazine, sc sont mis à philosopher. » Quant à la Nation chrétienne, totalement consacrée aux vertus, à la sainteté, à la vénération du Créateur, elle s’est fort peu occupée de la Philosophie ; sauf au cas où la perversité des hérétiques et les objections des insensés l’ont contrainte à défendre sa religion et sa foi, à détruire les doctrines ennemies du salut qu’elle espère ou contraires à l’honneur du Créateur. » Les hommes de cette religion, soucieux de leurs propres âmes, n’ont pas voulu prêter attention aux âmes des cieux ; il leur a semblé que, pour leur profession religieuse et pour leur salut, il n’y avait ni prolit à connaître ces âmes ni dommage à les ignorer. Que le Monde soit ou non un animal unique, que le Ciel entier soit un être animé ou bien que les divers cieux soient des êtres animés, ce sont questions que cette Nation chrétienne a’eu horreur et qu elle regarde comme monstrueuses. Elle est plongée dans la stupeur par celte discussion qui lui est demeurée absolument inconnue et dans laquelle elle voit une nouveauté qui 11e la concerne en rien... Eu cette partie de la Philosophie, sc lier à Aristote ou à n’importe quel autre n’offre aucun danger pour la religion, pour la foi, pour la doctrine des Chrétiens. » Mais dans l’enseignement des philosophes arabes ou juifs qui se réclamaient du nom d’Aristote, la théorie des intelligences et des i. Guillelmi Parîsiensis episcopi /Je //i/re/vo pars prû/ia principale ; Pars 11 (Guillelmi Pari si ens ls eu SCO pi Opéra, ed. ijiô, t. H, tractalus de jjrovidentia, cap, VII, fol. CXCV, colL a et b).