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PÉRIPATÉTISME, RELIGIONS ET SCIENCE

âmes qui meuvent les cieux ne demeurait pas isolée du reste de la Métaphysique, bien au contraire ; elle occupait, dans leurs systèmes, une place centrale et prépondérante, et toutes les autres doctrines se trouvaient, pour ainsi dire, reliées à celle-là. Or, indifférente à la th éorie nié me des moteurs des cieux, 1 Eglise ne pouvait l’être à plusieurs des théories que les Néo-platoniciens arabes ou juifs y avaient rattachées, et qui se trouvaient être, à son gré, de graves hérésies ; et d’autre part, les condamnations dont elle allait frapper ces hérésies ne pouvaient pas ne pas ébranler, par contre-coup, la doctrine des intelligences célestes quelle n’avait pas visée.

L’est, pour ainsi dire, par ses deux extrémités que la doctrine des intelligences célestes allait être exposée aux coups portés par 1 orthodoxie chrétienne ; elle était hérétique par la manière dont elle faisait sortir de Dieu ces intelligences ; elle était hérétique par la façon dont elle 1rs faisait aboutir au monde sublunaire. Seule, la première intelligence était émanée directement de Dieu ; de cette première intelligence avait procédé la seconde, de celle-ci la troisième, et ainsi de suite. En cette théorie néo-platonicienne des émanations successives, F Eglise catholique devait reconnaître et condamner une hérésie contraire à sa doctrine ; car, selon celle-ci, toutes les choses, tant célestes que sublunaires, en leur prodigieuse variété, ont etc immédiatement et directement créées par Dieu. Les anathèmes vont donc frapper à coups redoublés ce principe premier de la théorie des intelligences célestes : Seul, un être unique peut procéder immédiatement du Dieu un.

D’autre part, en la hiérarchie des intelligences célestes, celle qui meut l’orbe de la Lune ne se trouvait pas la plus humble ; au-dessous d’elle, il en était encore une ; et celle-là, c’était l’intelligence active (JnteZZechtv af/rns) qui, seule, mettait en branle la raison de tous les hommes ; c’est en elle que foutes les âmes humaines venaient se fondre après que la mort les avaient séparées de leurs corps.

A cette hérésie de limité de l’intellect humain, F Eglise catholique allait, au xmfi siècle, opposer renseignement de ses docteurs et les condamnations de scs évêques. Mais elle ne pourrait assurément la briser que toute la théorie des intelligences célestes ne s en trouvât, du môme coup, fortement ébranlée. Pour sauver, donc, le dogme de la création et la croyance en La survie personnelle de Filme humaine, elle allait saper des doc* triiies astronomiques et physiques que les précurseurs de Copernic