Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IV.djvu/333

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
327
LES SOURCES DU NÉO-PLATONISME ARABE

en quelque sorte l’une au-dessus (le l’autre dans l’ordre inverse des temps qui les ont vu paraître, il en forme les assises successives d’une vaste philosophie que couronne l’antique doctrine’de Platon.» Or, cette tour à trois étages, on donc ceux qui en furent les architectes ont-ils presque tous vécu ? Dans Alexandrie, où se trouvait alors la plus puissante communauté juive du Monde et les plus savants rabbins ; où les Chrétiens comptaient des docteurs tels que les Origènc et les Clément. Né du concours entre la tradition hébraïque, explicitée et achevée par le dogme chrétien, et la philosophie hellénique, le Néo-platonisme n’a cessé, pendant tout le cours de son développement, d’être soumis aux influences des théologies juive et chrétienne. La plupart de ceux qui l’ont édifié étaient tout pénétrés des dogmes que professent ces théologies.

Après Philon, le premier grand ouvrier du monument néo-platonicien est Numénius. « Numéuius était né en Syrie1, où il y avait quantité de Juifs, et où leurs doctrines étaient très répandues. Il avait lu la Bible, car il comparait les dogmes de Platon à ceux de Moïse et les trouvait identiques. Qu’est-ce que Platon, disait-il, sinon Moïse parlant la langue attique ? » Ammonius Saccas, qui fut le maître de Plotin, « était né dans la religion chrétienne 2, et il l avait quittée lorsqu’il avait commencé à se livrer à la philosophie. 11 était contemporain des Saint Panthène et des Saint Clément, qui essayaient alors d’enrichir la théologie chrétienne des dépouilles de la philosophie grecque, peut-être même élevé dans l’école des catéchumènes qu’ils dirigaient à Alexandrie ». Origènc a recueilli el publié certaines de ses leçons. La trace des enseignements d’Ammonius Saccas se reconnaît au traité lie naturel homini s, composé par Némésius. Or, Némésius est un chrétien, évêque d’Emcsc, qui applique la théorie d" Ammonius à l’union de la nature divine et de la nature humaine dans la personne du Christ3 ; et la très parfaite orthodoxie du /)e natura hoinini’t a longtemps valu à cet ouvrage l’honneur d’être attribué à Saint Grégoire de Nysse.

Pour exprimer la procession de l’intelligence à partir de 1 Un, Plotin use de métaphores : « Telle s’exhale une substance odorante ■ ; telle la chaleur s’échappe du feu et le froid de la neige ; tel luit et rayonne le Soleil ; tel déborde un vaisseau trop plein. i» F. Ravaisson, Op. laud.f p. 368.

a. F. Ravajsson, Op. laud.j p. 872.

3. F. Ravaisbon, Ôp. laitd., p. 3 ;4*

4. F. Ravaisbon, Op. laud., p. 435.