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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

À cette connexion qui justifie les pronostics des auspices, des aruspices, des astrologues, de tous les devins, Synésius ne donne pas le nom d’amour ; il ne la regarde point comme un effet de l’amour de Dieu pour ses créatures : elle n’est assurément pour lui, comme pour Plotin, comme pour les Stoïciens, rien d’autre que le Destin.

Si, touchant l’harmonie du Monde, nous voulons trouver quelque trace de la doctrine que Denys développera, c’est encore dans le traité Des mystères des Égyptiens qu’il nous les faudra chercher ; et celles-mêmes que nous y croirons reconnaître seront à peine visibles.

Nous avons entendu [1] Jamblique dire que la lumière des dieux « perfectionne toutes choses ; qu’à l’aide des intermédiaires, elle unit les extrêmes entre eux. » Or, si ce mouvement qui porte les choses à se conjoindre les unes aux autres est un effet de la providence divine, d’où vient qu’il puisse déterminer des unions coupables, des rapprochements douloureux ou mauvais pour telle ou telle partie de l’Univers ? À cette difficile question veut répondre l’auteur des Mystères des Égyptiens.

Avec toute l’Ecole néo-platonicienne, il déclare [2] :

« Toutes les forces qui descendent des corps célestes sont bonnes, mais elles peuvent être changées par le mélange des contraires ; la qualité, donc, qui, sur terre, est nuisible, est autre que celle qui, du ciel, était parvenue ici-bas… Tous les influx célestes qui nous arrivent sont salutaires ; mais la perversité du sujet qui leur est soumis les reçoit sous forme perverse, ou bien encore la faiblesse de ce sujet ne peut aisément. supporter l’efficace des causes supérieures. Tous les mouvements sont utiles, à la fois, à l’Univers et aux parties nécessaires de cet Univers ; mais, dans un tel mouvement, quelqu’une des particules les plus petites se trouve parfois blessée par quelqu’autre ; ou bien encore il arrive que de semblables particules ne supportent pas facilement le mouvement de l’Univers. Ainsi, dans une danse, les divers danseurs harmonisent leurs pas et accordent leurs gestes ; il arrive, cependant, dans F ensemble de la danse, qu’un doigt ou un pied se trouve heurté ou pressé ; et si quelque objet fragile vient à tomber au milieu des danseurs, il peut être écrasé. »

Une seconde fois, Jamblique reprend, et avec plus de détails, celte théorie de la présence du mal dans le Monde.

1. Vide supra, p. 354.

2. Iamblichus /Je znysteriis, Cap. XIV ; ed, cît., foE v°.

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