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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

chose est connue, on veut exprimer qu’elle a été dépouillée frfenndala ) de la matière. Lorsque nous posons qu’une chose qui a été dépouillée de la matière advient à line chose qui est indépendante de la matière, nous disons que ce qui se produit est connaissance (scienlia), et que ce en quoi cette opération se fait est connaissant (sciens). Par connaissance, en effet, on n’entend l ien d’autre que l’impression (sigillalio) d’une forme dépouillée par l’abstraction dans une chose qui est indépendante de la matière. Ce qui est imprimé dans cette chose-ci est connu, et ce en quoi l’impression se produit est connaissant. Par le mot connaissance, on veut exprimer ceci : Lorsqu’il y a connaissance, ce qui connaît et ce qui est connu sont un seul être ; nous comprenons donc par là que ce qui est indépendant de la matière et ce qui est dépouillé de la matière sont un seul (’t même être ; mais nous attribuons l’indépendance par rapport à la matière à ce qui connaît et la propriété d être dépouillé de la matière à ce qui est connu, afin d’éviter la contusion dans le sens des mots...

» Ni l’essence ni la puissance du premier Principe ne dépendent de la matière. Il est donc présent et évident à lui-même ; partant, il se connaît nécessairement lui-même, car son essence dépouillée de toute matière est présente à son essence indépendante de la matière ; et c’est cela même qu’on entend par connaissance. » Le Livre des Causes, écho de Proclus, avait insisté sur cette pensée : L’opération essentielle de toute substance séparée de la matière et subsistante par soi consiste à se réfléchir sur elle-même. Pour rendre saisissable cette pensée, Proclus l’avait appliquée à l’intelligence première et àl’Ainc du Monde ; il avait montré comment chacune de ces deux substances sc connaissait elle-même ; il n’avait pas essayé de montrer ce qu’au sein de l’Ln et de l’Etre, pouvait être cette opération réfléchie, si elle n était pas connaissance de soi-même. Al Gazàli va plus loin ; il affirme nettement qu’eu toute substance séparée de la matière, l’opération, cyclique, qui est l’acte même de cette substance, consiste dans la connaissance qu elle a d’elle-même ; l’acte essentiel de tout être indépendant de la matière est la réflexion pur laquelle il prend conscience de lui-mêiue. •

11 nous est donné maintenant de comprendre en sa plénitude la signification de cette phrase qu’AI Gazàli écrivait’, alors qu’il démontrait l’existence de l’Intelligence active : « Le mot Intelligence n’a pas d’autre sens que celui de substance nue de toute i. Philosophia Algazelis, Lib. II, tract. V, cap. II.