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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

besoin ; niais

telle a été la pen-

Philosophie païenne tout

cette privation : elle se ment vers lui. Ainsi le Bien suprême, parce qu’il est désirable, est la cause de tous les mouvements qui se font dans le Monde 1 ; « il meut à titre d’objet aimé, xivsï os w ; èpwuEvov. » Mais le premier Moteur est exempt de toute privation, il n’a besoin de rien, il ne désire rien ; partant, il n’a pas d amour pour ce qui se meut vers lui.

Le Monde, donc, désire et aime le Dieu dont il a Dieu n’aime pas le Monde qui a besoin de lui séc d Aristote, telle a été celle de la entière.

A cet amour du Momie pour Dieu qui doit l’affranchir de ses besoins, adjoindre un amour de Dieu pour les créatures auxquelles le Créateur souhaite de donner le bien qui est en lui ; au mouvement qui porte les êtres imparfaits vers l’Etre parfait, attribuer comme cause un mouvement de L Etre parfait vers les choses imparfaites, ce fut la propre pensée du Christianisme ; et la philosophie de Denys l’Aréopagite n’est pas autre chose que le développement de cette pensée.

Cette pensée, la Théologie d’Aristote avait eu l’audace de la traduire dans le langage du Stagirite.

Ce qui est en puissance, avait dit cette Théologie, éprouve un besoin qui dérive de la privation ; privée de la forme, la matière désire cette forme ; elle souhaite l’être en acte qui peut seul la lui conférer, elle aime cet être, elle se meut vers lui. Mais il est un autre besoin qui provient de la plénitude, non de la privation ; l’être eu acte ne pourrait, s’il ne trouvait un être en puissance, déployer les énergies qui sont en lui ; il ne pourrait être moteur s’il ne trouvait un mobile ; de ce besoin, découlent un désir et un amour ; ainsi la forme a besoin de la matière, désire la matière, aime la matière et se meut vers elle, afin de rencontrer la chose imparfaite à laquelle elle conférera la perfection.

Au désir et au mouvement qui portent la matière vers la forme, comme le veut la Métaphysique péripatéticienne, la Théologie d’Aristote adjoignait ainsi un amour et un mouvement qui portent la forme vers la matière ; le langage par lequel cette doctrine était formulée était emprunté au Lycée ; mais il u arrivait pas à dissimuler l’origine chrétienne de la doctrine. Ce caractère chrétien de la théorie que nous venons de rappeler n’a pu échapper à la clairvoyance des philosophes musulmans ; i. Aristote, Métaphysique, ). XI, c. VII (Ahistotelis Opéra, éd. Uiilot, vol. II, p. Goô ; éd. Becker, vol. il, p. 1072, col. b).