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LE NÉO-PLATONISME ARABE

de l’existence des corps célestes et de leurs mouvements autour de ces êtres inférieurs. Quiconque, en effet, se met en quête d’autre chose est assurément plus vil que l’objet de sa recherche. 11 en résulterait que les corps célestes sont plus vils que les substances inférieures... Comment l’intention du corps du Soleil serait-elle de créer ces choses viles, et comment ces choses viles seraient-elles l’objet auquel tend son éternel mouvement ?... .Jamais, donc, ce qui est noble ne tend vers ce qui est vil à cause de cette chose vile. Mais, dira-t-on, si quiconque s’inquiète d’une autre chose est plus vil que cette chose, le pasteur est donc plus vil que ses brebis, le maître plus vil que son disciple et le prophète que le peuple ?

Car le pasteur n’a souci que de ses brebis, le maître de son

disciple et le prophète du peuple. Nous répondrons à cela que le pasteur, en tant qu’il est pasteur, est plus vil que ses brebis ; mais il est plus noble en tant qu’il est homme... Si l’on ne considère en lui que ce fait qu’il est pasteur, assurément il est plus vil que ses brebis... Et on eu peut dire autant du maître et du prophète. La noblesse du prophète consiste en ceci qu’il est parfait par lui-même ; c’est par les propriétés qui sont en lui qu’il est noble, et non point parce qu’il enseigne au peuple. Si I on ne considérait rien en lui, sinon qu’il enseigne au peuple, il en résulterait que ceux qu’il cherche à instruire sont plus nobles que celui qui les instruit. »

Assurément, aucune philosophie, hors l’influence du Christianisme, n’a pu rendre intelligible la bienveillance par laquelle le supérieur, sans déchoir, désire le bien de l’inférieur ; aucune n’a pu comprendre que le prophète aime son peuple, que le Bon Pastour aime ses brebis jusqu’à donner sa vie pour elles. Vil

LA MATIÈRE PREMIÈRE

Tout ce que la doctrine chrétienne avait inspiré à la Théologie d’Aristote, voire au Livre (les Causes, Avicenne et Al Gazilli en ont soigneusement dépouillé leur philosophie ; par là, ils ont singulièrement rapproché leur pensée sinon de renseignement même d’Aristote, du moins de l’enseignement que maint commentateur péripatéticicn avait tiré des livres du Stagirite. 11 ne faudrait pas, cependant, tenir nos métaphysiciens arabes pour fidèles élèves du Lycée. 11 est, en particulier, une question