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LE NÉO-PLATONISME ARABE

qui le reçoit, elle se multiplie dans la première et imparticipable pluralité des Unités divines. Partout, dans la nature, on voit également deux principes dont le concours produit tout... » Or, expliquer toutes choses par le concours d’un principe un et simple avec un élément de multitude et de diversité qui y participe, auquel il se communique, qu’est-cc que cette théorie, sinon, sous une forme vague et mal définie, celle de la Métaphysique d Aristote ? »

Une pensée bien voisine de celle à laquelle tendait Damascius se reconnaît, d’ailleurs, dans la philosophie de Plotin. Sans doute, Plotin ne propose pas. à 1 Un, d’opposer la tiXiq à titre de premier principe de toute diversité ; mais il propose1 2, au Bien, d’opposer la à titre de premier principe de tout mal. Cette dualité d’un principe absolument bon et d’un principe absolument mauvais est assurément, dans la phil osophie de Plotin, un reflet du Gnosticisme ; mais elle est aussi, jusqu’à un certain point, un souvenir de la Métaphysique du Stagiritc.

A cette Métaphysique, la Théologie d’Aristote revient franchement et sans ambages ; si elle emprunte à Proclus la description des trois hypostases divines, c’est d’Aristote qu elle tient la définition a de « cette Matière simple, antérieure à toute création {prœcreatup dans laquelle seule l’Ame du Monde peut imprimer des formes. »

A la théorie péripatéticienne, si solidement liée en toutes scs parties, de la puissance et de l’acte, de la matière et de la forme, enfin de la causalité, substituer une théorie entièrement différente de la puissance, de l’acte, de la matière, de la forme et des causes, c’était une œuvre considérable ; cette œuvre, le Néo-platonisme arabe eut l’audace de l’entreprendre et la force de l’accomplir. Ebauchée, sous une forme encore imprécise, dans la Métaphysique d’Avicenne, la doctrine nouvelle se présente à nous, logiquement constituée jusqu’en ses moindres détails, dans la Philosophie d’Al Gazàli.

Dès le début, dès l’instant où l’on se propose de distinguer l’existence en acte de l’existence en puissance3, la divergence se marque entre la doctrine péripatéticienne et la doctrine que soutient Ai Gazàli.

1. Voir : Première partie, Ch. XIII, § VIII ; tome II, pp. 32i-3a3. 2. Abistütelis ïïteoloÿio, Lib. XIII, cap. VI ; écL ibig, fol.So, recto ;éd» 1072, fol. 13a, verso.

3. P/u7osop/iiœ Algazelis, Lib, I, tract, I : De dîvisionibus esse et de ejus accident i bus ; cap. Xll : Seplima divisio de ente in polenlia et in effectu.