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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

C’est une guerre d’escarmouches qu’Al Gazàli mène contre la Philosophie néo-platonicienne ; chaque affirmation est attaquée isolément ; c’est pierre à pierre que la ruine des Philosophes se consomme. Vue telle discussion ne sc laisse guère résumer. Aussi îi’entreprendrons-nous pas d’analyser les dix-neuf dissertations qui forment les deux parties du Téhâfout. Nous nous contenterons d’en extraire quelques idées essentielles émises au sujet des deux principales doctrines du Néo-platonisme arabe : Les processions des êtres à partir de Dieu et l’éternité du Monde. Après avoir admiré, dans la Philosophia Algazelis, la clarté dont. Al Gazàli faisait briller les systèmes des Philosophes, nous pourrons admirer, dans la Destruction la sûre perspicacité avec laquelle il en discerne les points faibles.

L’un des problèmes essentiels du Néo-platonisme consiste à concilier l’unité absolue de la Cause première avec la multiplicité et le changement que nous constatons dans le Monde créé ; ce problème, Damascius déjà reprochait à Proclus de ne l avoir pas su résoudre1 ; Al Fàràbi et Avicenne s’y sont essayés à leur tour ; Al Gazàli va montrer que leur tentative n’a pas abouti. Les Néo-platoniciens « ont posé - ce principe : De fin ne peut provenir qu’une seule chose. Or la Cause première est mie de tontes manières, tandis que le Monde est composé de choses diverses. Donc, d’après leurs propres axiomes, on ne peut concevoir que le Monde résulte de faction directe de Dieu ». Que vont donc imaginer les Philosophes ? « Le Monde3, pris dans son universalité, n’émane pas immédiatement de Dieu. Ce qui émane de Dieu, c’est un Etre unique, qui est le principe de toutes les créatures ; c’est une Intelligence séparée, c’est-à-dire une substance qui existe par soi, qui est exempte de toute multiplicité, qui sc connaît et connaît son principe..,. ; de cet Etre, émane un ■

second être, de ce second un troisième, du troisième un quatrième, en sorte que la multiplication des êtres se fait d’une manière Z/on reprenne ton jours sur nouveaux frais l’exposé des opinions des Philosophes, sans jamais renvoyer le lecteur an livre qui lui devait servir il’introduction. La phrase citée par Munk n’aurait-elle pas été ajoutée après coup au J/u/rdriW, par Al Gazàli lui-même ou par quelqu’un de ses disciples, pour masquer le volte-face de Pau leur ? Et si la traduction de Gondisalvi ne contient pas cette phrase, mais seulement : //oc ex/ quod vcdui/nus inducere dr xcierdiis pAiloJtopiïorum divïnis et natara/iAus, n’est-ce pas qu’elle aurait été faîte sur un exemplaire arabe de la rédaction primitive ? 1. Vide supra., p. 46o-46r.

2. Avekhois Cokülmiensis Desfructio destructionum Algazelis, Pars prima, Disputatio III, dix-huitième : Ait Algazel.

3. Averroès, /ot et/. ; dix-neuvième : Ail AlgazeL