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AVERROÈS

I Ine doctrine aussi directement contraire à celle d Aristote révolte le Péripatétisme jaloux d’Averroès 1 : « Je n’ai jamais vu qu aucun sage eût prétendu que Pâme fût innovée d’une innovation véritable, el qu ensuite elle demeurât permanente, sinon dans ccqu’Avicenno a raconté. Tous reconnaissent que celle innovation est purement relative, el qu elle consiste seulement en ceci, que 1 âme est mise en possession des possibilités corporelles. » Quant à la croyance à la multiplicité des âmes humaines, Averroès la condamne avec la dernière rigueur. Al Gazàli s’était exprimé en ces termes - : « Regardera-t-on comme véritable l’opinion de Platon ? Cette opinion était la suivante : L’âme est unique et existe de toute éternité ; elle se divise toutefois dans les divers corps ; lorsqu’ensuite elle en est séparée, elle retourne à sa source, à son principe et, de nouveau, dcvientunc. Nous répondrons que cela est bien plus abominable et bien plus absurde... Nous disons, nous, que l’âme de Socrate est autre que l’âme de Platon. Si elle était, la même, il en résulterait nécessairement une absurdité ; chacun, en elfet, a la perception «le son âme et sait bien qu elle n’est pas l’Ame d’un antre. Si elles étaient une mémo âme, elles seraient égales en toutes les connaissances qui sont attributs essentiels aux âmes. » Averroès riposte en formulant avec la plus grande netteté la théorie de l’unité de l’âme humaine :

« Socrate, dit-il est numériquement différent de Platon ; et cependant, Socrate cl Platon sont une meme chose en cette forme qui est l’âme. En effet, si Pâme de Socrate était numériquement distincte de l’âme de Platon, de même que Socrate est numériquement distinct de Platon, alors l’âme de Socrate et l’Ame de Platon seraient doux choses par le nombre el une même chose par la forme ; il y aurait donc une âme de l’âme. Puis donc qu’il est nécessaire que l’âme de Socrate soit, dans la forme, la meme que Pâme de Platon, qu elle soit une même chose en la forme, la multiplicité numérique, la division provient, en elle, de la distinction des matières. Par conséquent, si l’âme ne meurt pas lorsque meurt le corps ou s’il existe, en elle, quelque chose d’immortel, il est nécessaire, lorsqu’elle est séparée de tout ; corps, que l’âme soit numériquement mie... Le discours qu Al Gazàli développe en vue de détruire l’opinion de Platon est sophistique ; il se résume en ceci : Ou bien l’ânie do Platon est autre que l’âme de Socrate, 1. Averroès,

2. Averrois O/j. Mm//

3. Averroès,

M/d., réponse au trente-deuxième : Ait Algazel, >/). fai/d., Pars prima, Disputatio I, neuvième : Ait AlgazeL Me. e//., réponse au neuvième : Ait Algazel.