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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

Démontrer l’existence de cette Intelligence active est un des objets auxquels, sous des formes un peu différentes, dans son Traité de l’âme et dans sa Lettre sur la continuité entre Lhomme et l’Intelligence active, Avempace applique la puissance de son raisonnement

Le point de départ de son argumentation est celui-ci : En toute chose qui a eu commencement, on peut distinguer la chose même et son essence (guidditas) ; c’est le propre de notre intelligence d’extraire, de chaque chose, la quiddité, l’essence spécifique qui s’y trouve individualisée ; comprendre, c’est pratiquer cette extraction.

D’autre part, Avempace regarde comme certain que l’intelligence spéculative résidant en chacun de nous est soumise à la uénération et a la mort ; elle est donc de ces choses en lesquelles Fesserice sc distingue de la chose même ; et, par le pouvoir qui loi est naturel, F intelligence spéculative va comprendre sa propre essence.

Que sera cette essence de l’intelligence spéculative ? Sera-ce un être qui a eu commencement ? Si oui, elle sera chose distincte de son essence1, et 1 intelligence spéculative va saisir maintenant, en vertu du pouvoir que lui confère sa. nature, l essence de son essence. Mais ce procédé ne se peut continuer indéfiniment ; il faut que l’opération de notre intelligence spéculative ait un terme ; or cotte operation ne pourra s’arrêter tant que nous if atteindrons pas une essence dans laquelle on ne puisse plus, derechef, distinguer la chose de l’essence, un être qui soit identique à sa propre essence et qui, par conséquent, n’ait point eu de commencement* Cet êtrelà, c’est l1 Intelligence active*

Assurément, cette argumentation ne prouve pas rigoureusement que I Intelligence active soit l’essence même de l’intelligence spéculative ; outre cette essence et P Intelligence active, on pourrait échelonne)1 plusieurs essences, plusieurs intelligences intermédiaires, intelligences qui auraient commencement et qui seraient mortelles ; c’est cc qu’Al Fàrâbi semble avoir admis dans son traité De !a génération et de la corruption. Pour couper court à cette supposition, Ibn Bàdja emprunte cette règle au Stagirite ; Lorsqu’une démonstration repose sur l’impossibilité d un développement à l’infini, le mieux est d’arrêter ce développement dès le premier terme. Le recours à cette règle lui permet de formuler cette proposition, qui est de Thémistius : H i. Averroès, toc. cif.