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AVERROÈS

» Cette puissance, qui caractérise substantiellement le sujet [de toute génération et de toute corruption], diffère du sujet même qui est substantiellement déterminé par cette puissance, et voici en quoi consiste la différence : La puissance est ainsi nommée par rapport à la forme [que le sujet est en puissance de recevoir]. Quant au sujet, c est un des êtres qui existent par eux-mêmes, c’est l’élément unique et éternel de tous les êtres, existant par eux-mêmes, dont la substance est, par elle-même, en puissance. «Serf posse hoc, quo substanliatur hoc subjectum, differt a nalura subjecli quod substanliatur per hoc posse, in hoc, quod posse dicitur respecta formæ ; hoc autem subjectum est unum entiurn exislentium per se, et elementum unum ætemum existentium per se quorum svbstantia est in potenlia per se. »

« C’est difficile à comprendre ou à imaginer, poursuit Averroès. sinon par comparaison ou avec quelque autre chose, comme le dit Aristote. » 11 n’en est pas moins vrai que le Commentateur semble avoir très exactement interprété, sur ce point, la pensée du Philosophe. Cet ensemble de toutes les possibilités, qui existe cependant, car pouvoir être, c’est, au gré d’Aristote, une certaine manière d’être ; qui existe éternellement et par soi, car une chose ne peut commencer à devenir possible, car une chose possible ne tient que d’elle-même sa possibilité ; cet ensemble de possibilités, disons-nous, c’est bien la Tzpcovf, uXiq du Péripatétisme. Reprenons le chemin qui a conduit Averroès à reconnaître et à proclamer la nature purement potentielle de la Matière première, et arrêtons-nous quelque peu à considérer l’un des principes qui jalonnent cette voie.

Un individu, affirme ce principe, peut posséder un nombre quelconque de formes accidentelles ; le sujet qui reçoit ces formes, c’est quelque chose qui est déjà en acte, c’est une substance formée par l’union d’une forme substantielle et de la Matière première. Mais dans un individu unique, il ne peut pas exister deux formes substantielles différentes ; il existe une seule forme substantielle ; celle-ci est directement unie à la Matière première qui, d’aucune manière, n’est en acte ; car « ce qui est déjà en acte ne peut recevoir quelque autre chose qui soit en acte. Différant autem in hoc, quoniam invenit transmutalionem individuorum in suis subslantiis cogéré subjectum non esse ens acta, el non habere formam qua substanliatur. Si enim haberet formam, nullam aliam redperet nisi ilia destructa ; unum enim subjectum habere nisi imam formam impossibile est. Et si essel substanlia simpliciter