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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IV.djvu/545

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AVERROÈS

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AVERROÈS

dont il use an Sermo de substantia orbis ; c’est en commentant ce texte, en effet, qu’il est, fout d’abord, conduit à formuler cette proposition 1 2 : « Il est impossible que deux choses soient, en acte et que, de ces deux choses, à un certain moment, se produise nue chose unique, existant en acte, ces deux choses continuant, elles aussi, d’exister en acte. Impossibile est quod duo in aclu sial, ex quibus, in aligna hora, fiat umim in aclu, existenlibus illis in aclu. » Qui ne voit maintenant le glissement éprouvé par le sens de ce texte, tandis que celui-ci passait de la Métaphysique d’Aristote au Sermo de substantia orbis d’Averroès ?

Ce qu’Aristote entend prohiber, en invoquant ce principe, c’est une affirmation du irenre de celle-ci ; Un mixte de terre et d eau k--’

est vraiment une substance une et, cependant, la terre et 1 eau qui ont servi à le former y gardent leur existence actuelle. Il opposait cet axiome aux Atomistes de son temps ; il l eùt opposé aux atomistes modernes qui. au sein de l’eau, conçoivent la persistance substantielle de l’oxygène et de l’hydrogène. Il ne semble pas que le Sagirite ait entendu ce qu’on lui fera dire plus tard, qu’il ait voulu taxer d’absurdité la proposition suivante : Une certaine chose qui est composée par 1 union de la Matière première avec une première forme, ctqui, par conséquent , est déjà en acte d’une certaine manière, demeure, par ailleurs, en puissance dîme forme substantielle ; celle-ci, en s’unissant à ce premier composé de matière et de forme, donnera une substance. Comment, d’ailleurs, eût-il traité d’absurde cette survenue d une nouvelle forme, d’un nouvel acte, à quelque chose qui est déjà en une certaine manière ? N’est-ce

a son avis

formes accidentelles s’introduisent dans une substance, c’est-à-dire dans un composé déjà pourvu d une forme substantielle ? Ne nous a-t-il pas appris lui-même5 à échelonner les unes au-dessus des autres les diverses formes qui se rencontrent dans un même individu, puis, prenant l’ensemble de la Matière première et des formes inférieures à un certain degré, à le regarder comme une certaine matière disposée, à son tour, à recevoir les formes placées au-dessus de ce degré ? Ne nous a-t-il pas déclaré qu’on pouvait compter de la sorte, dans un individu, autant de matières différentes, et de mieux en mieux informées, qu’il y a, dans cet individu, de formes distinctes ?

1. Avfinnois Cordubensis /« Xli libros Metaphysicee Aristotelis commentant ; in lil>. X II Inunc VI) coinm. 49-

2. Voir : Première partie, Chapitre IV, | XII ; t. I, p. 20g.