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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

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LA CRIE DE L’ARISTOTÉLISME

» Ils disent que ces Intelligences se suivent les unes les autres, et cela, semble-t-il, comme l’eiFet suit la cause, en sorte qu’en dernière analyse, la première Substance doit être une et simple. Or, d un être qui est un et simple, ne peut provenir qu’un seul être ; comme du moteur du premier ciel proviennent l’âme de ce ciel et le moteur de l’orbe suivant, il est nécessaire que le moteur de ce premier ciel ne soit pas simple ; partant, il a une cause qui le précède. »

Cette doctrine est celle d’Al Fârâbi, d’Avicenne et d’AI Gazàli. Averroès la traite avec un profond mépris : « C’est un raisonnement que peut délier quiconque est exercé en Philosophie... C’est un discours de pure imagination. » En effet, la relation que cette théorie établit entre les Intelligences séparées, dont chacune est cause créatrice de la suivante, est inintelligible à un Péripatéticien pour qui toute cause créatrice est inconcevable* « Il n’y a nullement ici une chose qui provienne d une autre, qui la suive, qui soit faite par elle à, la façon dont nous disons qu’une action suit P agent qui la produit, »

De cette théorie néo-platonicienne qu’il a si fort malmenée, Averroès gardera cependant quelque chose qui sera, pour les Intelligences célestes, comme un principe de subordination, comme une règle de hiérarchie*

Selon la d’Aristote, chaque sphère céleste était mue par le désir de s’assimiler à rintelligence séparée qui lui était propre ; chaque sphère formait donc, avec son Intelligence, une sorte de système clos au sein duquel ne pénétrait aucune connaissance des autres Intelligences*

Voici, maintenant, ce qu’Averroès va supposer : Le moteur du corps de chaque ciel, ce qu’on peut, si Fon veut, appeler Fàme de ce ciel, ne connaît pas et ne désire pas uniquement rintelligence appropriée à ce ciel ; l’Ame de chaque ciel connaît non seulement rintelligence particulière à ce ciel-là, mais encore 1 hitellij 3’iicf motrice de la sphère suprême, Or, c est parce qu’une Intellige nee séparée est connue d’une âme céleste qu elle est, d une certaine manière, cause de celte âme, non point .certes cause créatrice, mais cause finale du mouvement que cette âme communique au corps du ciel. L’Intelligence motrice de l orbe suprême va donc, dans une certaine mesure, être cause finale de tous Jes moteurs célestes.

En tout ceci, dit Averroès, il n y a point de cause ni d’effet, si ce i/est dans le sens oïl l’on peut dire que ce qui est compris est cause de celui qui comprend. En ce sens, une substance qui est,