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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — I. LES ASTRONOMES

du calendrier. Or, de ces défauts, il y en a treize qui sont radicaux, et ils ont poussé des rameaux en nombre presque infini. Si donc cette glorieuse œuvre s’accomplissait au temps de Votre Sainteté, alors s’accomplirait une des choses les plus grandes, les meilleures et les plus belles qui aient jamais été tentées dans l’Église de Dieu. »

Bacon avait donc proposé à Clément IV l’accomplissement d’un travail que le pape ne pouvait réaliser, et cela pour une raison que Bacon lui-même connaissait et avouait. Et, cependant, Bacon n’avait pas fait œuvre vaine. Il avait désigné celui à qui il appartenait de provoquer les études préparatoires réclamées par la correction du calendrier, de décréter cette correction au jour où elle aurait acquis la précision et la certitude nécessaires. Désormais, la réforme du calendrier était à tâche à la Papauté.

Passons rapidement sur deux traités de Computus que nous présente la fin du xiiie siècle[1] ; l’un, rédigé par un moine dont le nom nous est connu seulement sous cette forme abrégée : Johannes de S., renferme des tables qui prennent l’année 1273 pour point de départ ; l’autre rédigé par un certain Magister Gordianus, qui connaît les traités de Joannes de Sacro-Bosco et de Robert Grosse-Teste, est daté de l’an 1300 ; ni l’un ni l’autre de ces deux écrits ne fait faire, au problème de la réforme du calendrier, le moindre progrès ; hâtons-nous d’arriver au xive siècle.

Un événement considérable s’est produit, qui semble de nature à presser l’achèvement de la réforme : les Tabulæ Alfonsii sont venues, au voisinage de l’an 1300, à la connaissance des astronomes de Paris. Minutieusement examinées par eux et soumises au contrôle d’observations précises, elles n’ont pas tardé à se montrer plus défectueuses qu’on ne l’eût souhaité. Moins inexactes cependant que les Tables de Tolèdes, elles ont fini par obtenir au moins un crédit provisoire. On a pu penser, dès lors, qu’elles permettraient la réparation, depuis si longtemps désirée, du calendrier,

Jean de Murs paraît être un des premiers qui ait songe à faire usage des Tables Alphonsines pour restaurer l’exactitude du calendrier, Dès 1337, il écrit[2], dans ce but, un opuscule ; il y propose, pour compenser l’erreur accumulée, depuis le début de notre ère, par l’emploi du calendrier julien, de supprimer toutes les années bissextiles que contiendra une période de quarante ans.

  1. Kaltenbrunner, Op. laud., pp. 307-310.
  2. Schubring, Zur Erinnerung an die Gregorianische Kalenderreform, 1883, p. 7. — Nous citons cet ouvrage, que nous n’avons pu consulter, d’après Moritz Cantor, Vorlesungen über die Geschichte der Mathematik. Bd. II, 2te Aufl,, Leipzig, 1900, p. 125.