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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

exercices de pure dialectique ou qui prétendaient philosopher d’une manière générale sur les principes de la Nature, sans entrer dans l’étude détaillée des phénomènes. Nous en avons pour témoin cette curieuse diatribe, qu’anime la verve d’Alain de Lille :

« Il est des gens, comme les sophistes, qui semblent sages on savants ; c’est d’eux qu’Aristote dit : Paraître et ne pas être semble, à certains hommes, beaucoup plus précieux que d’être et de ne point paraître. Maître Alain écrit, en parlant de ceux-là :


Hujus scolas visitant pauperes legistæ ;
Vanas lites agitant ; fiunt agonistæ ;
Hic probat, hic improbat, huic concludit iste,
Atque duo centum conclamant ore sophistæ.

» Au second livre de la Métaphysique, le Commentateur dit qu’entre les vrais savants, il y a différence suivant le plus ou moins de certitude. Les Sciences mathématiques sont au plus haut degré de certitude, La Physique vient après.

» Ceux qui ont en partage le moins de certitude, savoir les logiciens et les physiciens, négligent de se reporter aux autres sciences ; en fait de philosophie, ils n’ont que des paroles. C’est d’eux que Maître Alain dit encore :


Iste semper clamitat et argumentatur,
Dum aristotelicas latebras rimatur ;
Sed si quæras qualiter aut qui depulatur,
Mens studio vivit, sed venter philosophatur.

» Ceux qui ont en partage le plus de certitude sont les mathématiciens ; mais ceux-ci, à leur tour, se partagent en deux catégories. Parmi eux, en effet, il en est qui étudient seulement les mouvements des astres et qui ne se soucient point d’Astrologie judiciaire, ou même qui la nient… D’autres, au contraire, s’adonnent, à la fois, à l’étude des mouvements et à celle des jugements. »

En 1356, au début de ses Exemples sur les canons relatifs aux Tables Alphonsines, Jean de Saxe ne fera point de difficulté d’accorder que l’Astronomie qui étudie les mouvements célestes est seule une science certaine, et de reléguer l’Astrologie judiciaire au rang des opinions. Il ne pouvait guère, en 1331, au début d’un écrit consacré à l’Astrologie, laisser percer pareil scepticisme. Il emprunte donc à l’Introductorium in Astronomiam Albumasaris l’énumération des diverses catégories de personnes qui repous-