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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/355

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

allemands, comme dépositaire de cette tradition. La plupart des Universités allemandes, nous l’avons vu, se piquaient de rappeler, par leur règlement comme par l’esprit, qui guidait leurs études, l’Alma mater dont elles étaient, en quelque sorte, des colonies ; en particulier, l’enseignement astronomique qu’elles donnaient s’inspirait des Jean des Linières, des Jean de Murs, des Firmin de Belleval, des Jean de Saxe.

S’il est une école où cette inspiration ait soufflé avec une grande puissance, où elle détermine un mouvement prolongé et efficace, c’est assurément l’École de Vienne.

Fondée par un maître parisien, Albert de Richmersdorf, reconstituée par un autre maître parisien, Henri de Hesse, l’Université de Vienne était fière du lien qui la rattachait à l’Université de Paris. Les astronomes qu’elle comptait dans son sein ne manquaient pas de rappeler ce lien et d’en tirer vanité.

En 1514, Georges Tannstetter, qui professait l’Astronomie à Vienne, publiait, dans-cette ville, les Tables des éclipses de Georges de Peurbach et les Tables du premier mobile de Regiomontanus[1]. En avant de cette édition, il avait l’heureuse idée de placer une suite de courtes notices sur les mathématiciens qui avaient, avant lui, honoré le gymnase viennois : Viri mathematici quos inelytum Viennense gymnasium ordine célebres habuit.

En tête de la liste qu’il dressait, Georges Tannstetter inscrivait le nom d’Henri de Hesse ; ce qu’il en disait[2], nous avons eu, déjà, l’occasion de le rapporter[3] ; nous avons dit avec quel soin il rappelait qu’Henri était venu « de la très vieille Université de Paris, ex vetustissimo Parisiensium studio » ; par ses commentaires sur la Genèse, Henri a montré la profondeur de ses connaissances astronomiques ; et ces connaissances ne nous doivent pas étonner, « car il était le contemporain de très savants astronomes de Paris, le Germain Jean des Linières et Jean de Saxe ». En faisant de Jean de Linières un Allemand et un contemporain d’Henri de Hesse, Tannstetter se trompe doublement ; mais son erreur ne prouve qu’avec plus de force le souci qu’il a de faire, du Plantator gymnasii Viennensis, un continuateur de la tradition astronomique de Paris.

  1. Tabulæ eclypsium Magistri Georgii Peurbachii Tabula primi mobilis Joannis de Monteregio. Viennæ, 1514. — Pour la description de cette édition, voir : plus haut, ch. II, § II, pp. 140-141.
  2. Georgii Tannstetter Op. laud., 3e fol. imprimé, vo.
  3. Voir : plus haut, ch. II, § II, p. 141.