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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/440

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PAUL DE VENISE

mais cette manière de raisonner sur la résistance de l’air était, elle aussi, bien connue à Paris ; on en usait pour expliquer le prétendu repos, au sommet de sa course, du projectile verticalement lancé ; en particulier, Marsile d’Inghen avait longuement insisté sur ce genre de considérations[1] ; nous pouvons donc encore, en cette circonstance, regarder Paul de Venise comme un disciple de F École de Paris.


IX
LA PLURALITÉ DES MONDES


Les diverses circonstances où Paul de Venise a traité de la pluralité des mondes nous sont encore occasion de constater l’influence exercée sur son intelligence par l’enseignement de Paris.

Dans sa Summa philosophiæ, notre auteur consacre tout un chapitre[2] au problème de la pluralité des mondes. Ce chapitre ne fait que résumer assez fidèlement ce qu’Albert de Saxe avait dit de la même question. Comme Albert, Paul conclut qu’il ne saurait y avoir plus d’un monde. « Supposons, toutefois, qu’il y ait deux mondes ; bien que cette terre-ci fût de même espèce que la terre de l’autre monde, elle ne pourrait se mouvoir vers cette dernière terre ; les Cieux mettraient obstacle à son mouvement et l’empêcheraient de passer d’un monde à l’autre. Toutefois, si l’on imaginait qu’on prît une parcelle de notre terre et qu’on la plaçât à l’intérieur de l’autre monde, elle se mouvrait vers la terre de cet autre monde ; de même, en notre hémisphère, le feu se meut vers le pôle arctique, mais il se mouvrait vers le pôle antarctique, et cela en vertu de la même inclination, si on le plaçait dans l’autre hémisphère. Par conséquent, s’il existait plusieurs mondes, le feu du premier se dirigerait vers la concavité de l’orbe de la Lune du second, et inversement ; et l’air du premier se mouvrait vers la concavité de la sphère ignée du second, et réciproquement. »

  1. Voir : Cinquième partie, ch, XI, § XI, t. VIII, p. 312.
  2. Pauli Veneti Summa philosophiæ, pars secunda, cap. IV