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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

assuré des honoraires ? Dis-moi, quel savoir-faire as-tu ? — Je fais des livres. — Tu es donc garçon imprimeur ? — Non, je travaille pour la maculature, comme M. E… M. J… M. A… M. B… M. C… M. T… et tous ces messieurs. — Qu’est-ce que le talent de la maculature ? — La maculature, madame est cette partie de l’impression qui sert à envelopper l’autre : Par exemple, les frères Cramer à Genève, Saillant à Paris, Marc-Michel Rey à Amsterdam, Machuel à Rouen, qui sont les libraires français les plus connus de l’Europe, ont-ils quelques centaines de Voltaire, de Jean-Jacques, de Montesquieu à expédier ; ils les enveloppent avec de la maculature. — Pourquoi prends-tu la peine de composer de la maculature pour emballer les ouvrages d’autrui ? le papier blanc ne servirait-il pas également ?

« — Le papier blanc serait assurément la même chose, mais il y a des imprimeurs qui donnent malheureusement dans ce mauvais genre. Un libraire, dont le trisaïeul a eu la pensée d’être un honnête homme, a imprimé le maudit poème de la P***, ouvrage excellent pour la partie que j’entends. — Dis-moi, au lieu de barbouiller de la maculature, ne ferais-tu pas mieux de composer quelque bon livre ? — Votre idée est admirable, c’est le singe qui conseille au renard de couper sa queue ; si je travaille du bon, il faut du temps pour digérer la besogne, je ne gagnerais pas un sol. — Je ne te comprends pas ! — Daignez m’écouter, je vais me rendre intelligible.