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Page:Dumarsais - Œuvres, t3, 1797.djvu/151

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DE DU MARSAIS.

écrire simplement que de s’amuser à des jeux de mots puérils, froids et fades : en voici un exemple dans cette épitaphe de Despautère.


Grammáticam scivit, multos docúitque per annos ;
Declináre tamen non pótuit túmulum.


Vous voyez que l’auteur joue sur la double signification de declináre.

Il sut la grammaire, il l’enseigna pendant plusieurs années, et cependant, il ne put décliner le mot túmulus. Selon cette traduction, la pensée est fausse ; car Despautère savoit fort bien décliner túmulus.

Que si l’on ne prend point túmulus matérièlement, et qu’on le prène pour ce qu’il signifie, c’est-à-dire, pour le tombeau, et par métonymie pour la mort, alors il faudra traduire que, malgré toute la conoissance que Despautère avoit de la grammaire, il ne put éviter la mort : ce qui n’a ni sel, ni raison ; car on sait bien que la grammaire n’exente pas de la nécessité de mourir.

La traduction est l’écueil de ces sortes de pensées. Quand une pensée est solide, tout ce qu’elle a de réalité se conserve dans la traduction ; mais quand toute sa valeur ne consiste que dans un jeu de mots, ce faux brillant se dissipe par la traduction.

Boileau, Art. Poët. chant. 2.

Giles Robin, natif du S. Esprit, de l’académie d’Arles


Ce n’est pas toutefois qu’une muse un peu fine
Sur un mot, en passant, ne joue et ne badine ;
Et d’un sens détourné n’abuse avec succès :
Mais fuyez sur ce point un ridicule excès.


Dans le placet que M. Robin présenta au roi pour être maintenu dans la possession d’une