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DE DU MARSAIS.

la poésie, la musique, la peinture, et le discours public ». Il n’y a point là de figure ; c’est-à-dire, que toute celle phrase ne fait autre chose qu’exprimer la pensée de M. de la Bruyère, sans avoir de plus un de ces tours qui ont un caractère particulier. Mais quand il ajoute, « Quel supplice que d’entendre déclamer pompeusement un froid discours, ou prononcer de médiocres vers avec emphase » ! c’est la même pensée ; mais de plus elle est exprimée sous la forme particulière de la surprise, de l’admiration, c’est une figure.

Imaginez-vous pour un moment une multitude de soldats, dont les uns n’ont que l’habit ordinaire qu’ils avoient avant leur engagement, et les autres ont l’habit uniforme de leur régiment : ceux-ci ont tous un habit qui les distingue, et qui fait conoître de quel régiment ils sont ; les uns sont habillés de rouge, les autres de bleu, de blanc, de jaune, etc. 11 en est de même des assemblages de mots qui composent le discours ; un lecteur instruit raporte un tel mot, une telle phrase à une telle espèce de figure, selon qu’il y reconoît la forme, le signe, le caractère de cette figure ; les phrases et les mots, qui n’ont la marque d’aucune figure particulière, sont corne les soldats qui n’ont l’habit d’aucun régiment : elles n’ont d’autres modifications que celles qui sont nécessaires pour faire conoître ce qu’on pense.

il ne faut point s’étoner si les figures, quand elles sont employées à propos, donent de la vivacité, de la force, ou de la grâce au discours ; car outre la propriété d’exprimer les pensées, come tous les autres assemblages de mots, elles