Page:Dumas - Œuvres - 1838, vol.2.djvu/600

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arana, l’ami de votre frère, le maître de ses biens et de ses vassaux. Après, eh bien, vous serez ce qu’il est, et vous lui ferez ce qu’il vous a fait, ou autre chose.

DON JOSÈS.

C’est infernal !… Mais n’importe : ordonne à ces portes de s’ouvrir, et marche devant, je te suis.

LE MAUVAIS ANGE.

Voulez-vous passer par le chemin le plus court ?

DON JOSÈS.

Oui.

LE MAUVAIS ANGE.

Donnez-moi la main.

DON JOSÈS.

La voilà.

LE MAUVAIS ANGE, s’enfonçant en terre avec lui

Allons !

INTERMÈDE.

Le bon Ange, LA VIERGE.

Au ciel. ? Le théâtre représente l’espace, des nuages flottent ; La Vierge est assise, éclairée par une lumière ardente. À trois ou quatre pieds au-dessous d’elle, le bon Ange est à genoux.

LE BON ANGE.

Vierge, à qui le calice à la liqueur amère
Fut si souvent offert ;
Mère, que l’on nomma la douloureuse mère,
Tant vous avez souffert ;
Vous dont les yeux divins, sur la terre des hommes,
Ont versé plus de pleurs
Que vos pieds n’ont depuis, dans le ciel où nous sommes,
Fait éclore de fleurs ;
Vase d’élection, étoile matinale,
Miroir de pureté,
Vous qui priez pour nous, d’une voix virginale,
La suprême bonté ;
À mon tour, aujourd’hui, bienheureuse Marie,
Je tombe à vos genoux ;
Daignez donc m’écouter, car c’est vous que je prie,
Vous qui priez pour nous.

LA VIERGE.

Parlez ; car mes regards, parmi ces blondes têtes
Dont Dieu s’environna,
Vous cherchèrent souvent., Je vous connais : vous êtes
L’ange de Marana.
Pour calmer au plus tôt votre douleur amère,
Dites, que pouvons-Nous ?
Parlez ; mon Fils n’a pas de refus pour sa mère,
Ni sa mère pour vous.

LE BON ANGE.

Ô Vierge ! Vous savez quel céleste mystère
M’enchaînait au bas lieu,
Et pourquoi je restai si longtemps sur la terre,
Loin de vous et de Dieu.
Je veillais sur Don Juan ; mais l’esprit de l’abîme
Plus que moi fut puissant,
Et Don Juan, à sa voix, fit un pas vers le crime
Par un chemin de sang.
Alors, je remontai vers la céleste voûte,
Pleurant sur le maudit,
Et criant au Seigneur : « Il changera de route ! »
Le seigneur répondit :
« Sois encore une fois son ange tutélaire,
Et, jusqu’à ton retour
Je laisserai dormir le fer de ma colère
Aux mains de mon amour. »
J’allai donc, lui portant la parole céleste
Comme un divin trésor ;
Mais voilà que Don Juan, dans la route funeste,
A fait un pas encor.
Et je n’ose apporter ces nouvelles du monde
Au divin tribunal ;