Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/471

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avoir fini avec le coq de tante Angélique, dont la dernière bouchée n’était pas absorbée depuis plus d’une demi-heure. Ce qu’il avait demandé ne lui fit donc pas gagner tout le temps qu’il espérait, tant il fut servi rapidement.

Il vit qu’il fallait faire un effort supérieur, et se mit à manger. Mais quelle que fût sa bonne volonté de continuer, au bout d’un instant force lui fut de s’arrêter.

— Qu’as-tu ? demanda madame Billot. — Dam ! j’ai que… — À boire pour Pitou. — J’ai du cidre madame Billot. — Mais peut-être aimes-tu mieux l’eau-de-vie ? — L’eau-de-vie ? — Oui, es-tu accoutumé d’en boire à Paris ?

La brave femme supposait que pendant ses douze jours d’absence Pitou avait eu le temps de se corrompre.

Pitou repoussa fièrement la supposition.

— De l’eau-de-vie ! dit-il, moi, jamais. — Alors, parle. — Si je parle, dit Pitou, il faudra que je recommence pour mademoiselle Catherine, et c’est long.

Deux ou trois personnes se précipitèrent vers la buanderie, pour aller chercher mademoiselle Catherine.

Mais, tandis que tout le monde courait du même côté, Pitou machinalement tourna les yeux vers l’escalier qui conduisait au premier étage, et le vent d’en bas ayant fait courant d’air avec le haut, il aperçut par une porte ouverte Catherine qui regardait à une fenêtre. Catherine regardait du côté de la forêt, c’est-à-dire du côté de Boursonne.

Catherine était tellement absorbée dans sa contemplation, que rien de tout ce mouvement ne l’avait frappée, que rien de l’intérieur n’avait appelé son attention, tout à ce qui se passait dehors.

— Ah ! ah ! dit-il en soupirant, du côté de la forêt, du côté de Boursonne, du côté de monsieur Isidore de Charny, oui, c’est cela. Et il poussa un second soupir, plus lamentable encore que le premier. En ce moment les messagers revenaient, non-seulement de la buanderie, mais de tous les endroits où pouvait être Catherine.

— Eh bien ? demanda madame Billot. — Nous n’avons pas vu Mademoiselle. — Catherine ! Catherine ! cria madame Billot. La jeune fille n’entendait rien.

_ Pitou alors se hasarda à parler.

— Madame Billot, dit-il, je sais bien pourquoi on n’a pas trouvé mademoiselle Catherine à la buanderie, moi. — Pourquoi ne l’y a-t-on pas trouvée ? —Dam ! c’est qu’elle n’y est pas. — Tu sais donc où elle est, toi ? — Oui. — Où est-elle ? — Elle est là-haut.