Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/542

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Le cinquième battait bravement, conduisant hors d’Haramont ses trente-trois gardes nationaux.

On remarquait parmi les spectateurs une partie de l’aristocratie nobiliaire et bourgeoise de Villers-Cotterets, qui était venue là pour rire. En outre, un grand nombre de fermiers des environs qui étaient venus là pour voir.

Bientôt arrivèrent sur deux chevaux, côte à côte, Catherine et la mère Billot.

C’était le moment où la garde nationale d’Haramont débouchait du village, avec un fifre, un tambour et son commandant Pitou, monté sur un grand cheval blanc qu’avait prêté à Pitou Maniquet, son lieutenant, afin que l’imitation de Paris fût plus complète, et que monsieur le marquis de Lafayette fût représenté ad vivum à Haramont.

Pitou, étincelant d’orgueil et d’aplomb, chevauchait l’épée à la main sur ce large cheval aux crins dorés ; et, sans ironie, il représentait sinon quelque chose d’élégant et d’aristocratique, du moins quelque chose de robuste et de vaillant qui faisait plaisir à voir. Cette entrée triomphale de Pitou et de ses hommes, c’est-à-dire de ceux qui avaient donné le branle à la province, fut saluée par de joyeuses acclamations.

La garde nationale, à Haramont, avait des chapeaux pareils, tous ornés de la cocarde nationale, des fusils reluisants, et marchait sur deux files avec un ensemble des plus satisfaisants. Aussi, lorsqu’elle arriva sur le champ de manœuvre, elle avait déjà conquis tous les suffrages de l’assemblée. Pitou, du coin de l’œil, aperçut Catherine. Elle rougit, elle pâlit.

La revue, dès ce moment, eut pour lui plus d’intérêt que pour tout le monde.

Il fit faire à ses hommes le simple exercice du fusil d’abord, et chacun des mouvements qu’il ordonna fut si précisément exécuté que l’air éclata de bravos.

Mais il n’en fut pas de même des autres villages ; ils se montrèrent mous et irréguliers.

Les uns à moitié armés, à moitié instruits, se sentaient déjà démoralisés par la comparaison ; les autres exagéraient avec orgueil ce qu’ils savaient si bien la veille.

Tous ne donnèrent que des résultats imparfaits. Mais de l’exercice on allait passer à la manœuvre. C’était là que le sergent attendait son émule Pitou.

Le sergent avait, vu l’ancienneté, reçu le commandement général, et